samedi 7 avril 2007

L'Image mystérieuse.

Un chevalier empoussiéré à l'armure rouillée par la pluie et les combats incertains pénètre dans la cour de son château. Il revient de Palestine en passant par Byzance! Il s'appelle Geoffroy de Charny Sa troupe d'accompagnateurs décharge les lourdes caisses de butins et de cadeaux ramenés de là-bas! Nous sommes en Lorraine, à la fin de ce 14iéme siècle effroyable qui vit le début de la guerre de cent ans et les ravages de la grande peste! Peu de temps après, dans la petite chapelle de Lirey, on expose une étrange relique qui est, dit-on, le linceul ayant recouvert le corps du Christ! En cette époque troublée où les reliques d'un Saint suffiraient à reconstituer le squelette d'une dizaine de personnes, le scandale éclate pourtant! C'est que l'affaire est grave! Ne voit-on pas sur ce grand drap blanc l'image d'un corps supplicié et surtout un visage coiffé d'une couronne d"épines! La crédulité a ses limites, pense-t-on dans les milieux ecclésiastiques de la région! C'est ainsi que l'évêque de Troyes envoie, en 1357, une lettre au Pape. Connue sous le nom de "manifeste de Troyes", une copie en est conservée soigneusement à la Bibliothèque de France. L'évêque y affirme avec force détails que l'on a affaire à un faux grossier destiné à détourner les âmes pieuses de la vraie Foi enseignée par l'Eglise! Il dénonce même "l'artiste" ayant peint cette "œuvre impie". Son nom ne nous sera hélas, jamais connu! Peine perdue! L'objet du délit défie les autorités religieuses! Mais comme on se lasse de tout, même de saintes reliques, l'objet tombe dans l'oubli le plus profond! Arrivé à ce stade de l'histoire, on peut légitimement penser que tout est dit! Pourtant c'est là que tout commence, au contraire! Donc, on sait déjà que c'est un faux, et pendant plusieurs siècles, il va en être ainsi! C'est le paradoxe suprême de cette histoire. Tout le monde s'accorde à penser, Eglise en tête, que cet objet ne présente aucun intérêt, aucune valeur, sinon historique ou à la rigueur sentimentale. Cette opinion va atteinte son paroxysme à la fin du 19iéme siècle, en pleine révolution industrielle, et en plein triomphe de la science moderne sur l'obscurantisme religieux! C'est l'époque d'Auguste Comte et de son "positivisme". Marx a publié son "capital". Emile Combes, en France, va bientôt préparer la séparation de l'Eglise et de l'Etat en commençant par la confiscation totale de tous les biens du clergé! Bref! On ne peut pas dire que l'on baigne dans une franche religiosité! Pour ce qui est de notre pauvre objet, voici ce qui lui est arrivé depuis que nous l'avons quitté en Champagne. De la famille de Charny, il passe à celle des comtes de Savoie qui l'emmènent à Chambéry, capitale du comté à cette époque! Il va dormir là tranquillement pendant près de deux siècles jusqu'à une nuit tragique où la chapelle en bois qui l'héberge est ravagée par un incendie en 1532. Sauvé miraculeusement du feu, il est restauré par des religieuses deux ans plus tard. Il conservera toujours les traces de cette aventure sous la forme de pièces de tissu cousues aux coins des pliures. Ensuite la maison de Savoie émigre de l'autre côté des Alpes, et s'installe dans sa nouvelle capitale, Turin. Une nouvelle chapelle est édifiée pour l'accueillir, que l'on peut toujours admirer, et qui a brûlé, elle aussi, il y a quelques années lors de travaux de restauration! Jusque là, je vous l'accorde, rien d'extraordinaire! Il fait partie des millions d'objets pieux qui dorment dans la multitude des édifices religieux qui parsèment l'Europe entière. Il est d'un anonymat désespérant! Un brocanteur n'en tirerait pas dix francs dans un marché aux puces! Attendez un peu la suite! Vous allez assister maintenant à sa vraie naissance! A l'événement choc qui va le faire passer de simple objet plein de poussière et de mépris, à celui par qui le scandale va arriver en trombe et en fanfare! Dans cette bonne ville de Turin, un avocat du nom de Secondo Pià exerçait ses talents de photographe amateur sur tous les monuments de la ville. Il faut savoir qu'à l'époque, la photographie était une science naissante, et un art nouveau qui fascinait encore beaucoup le public. Ce photographe amateur demanda donc aux autorités ecclésiastiques l'autorisation d'exercer son art balbutiant sur le linceul lors d'une "ostension" qui aurait lieu en mai. On entend par "ostension" et non pas "ostentation" le fait d'exposer une relique à l'occasion d'une cérémonie religieuse. Il faut savoir que l'ostension du suaire était un moment privilégié à plusieurs titres; Le premier est qu'il avait lieu tous les dix ans! Le deuxième est qu'à cette occasion, il était déployé dans son entier! D'habitude il reposait plié dans sa châsse d'argent comme une vulgaire nappe de salon après un repas de première communion! Un beau soir, notre artiste s'installe dans la chapelle silencieuse et déserte, il est devant sa grande chambre photographique en bois. Il installe les projecteurs, fait les réglages d'usage et prend plusieurs clichés sur ses belles plaques de verres en des poses de plusieurs minutes chacune. Après son travail méthodique et solitaire, il se retire dans son laboratoire et procède au développement. Soudain, à la fin du trempage dans le bain de produit révélateur, l'émotion manque de lui faire échapper la plaque de verre de ses doigts! Ce qu'il voit le pétrifie! Un visage! Le visage d'un homme! Celui-ci est parfaitement visible, comme apparu du néant! Il est grave et fascinant! La stupeur monte d'un cran quand notre homme saisi instantanément un mystère encore plus grand! Parce qu'il est photographe, il comprend que le suaire tout entier n'est qu'un IMMENSE négatif photographique! Nous étions le 28 mai 1898 Et oui négatif + négatif = positif! Vous savez, comme en mathématiques moins par moins égale plus! Ou encore les ennemis de mes ennemis sont mes amis etc…. Si vous faites comme moi, que vous scanner l'image du suaire, et que vous traitiez l'image par un logiciel de dessin assez perfectionné, amusez-vous à passer de l'image positive en image négative! Un vrai bonheur! Vous croyez peut-être que cela s'arrête là? Bande de naïfs! Il y a une suite! Alors revenons à cette image photographique ! N’était-elle pas extraordinaire ? Et à plus d’un titre ! Premièrement comment peut-on expliquer qu’un faussaire du 14° siècle se soit casser les pieds à faire un négatif d’une image, pour une masse de paysans incultes qui n’en demandaient pas tant ? J’attends les esprits forts au tournant ! Et qu’il a fallu l’aube du 20iéme siècle pour en saisir toute l’importance grâce à la photographie ? Deuxièmement, chose plus incroyable, cette photographie est TRIDIMENSIONELLE ! Ah ! J’entends d’ici les soupirs de consternation ! Quézaco ? De quoi « c’est-y qui nous cause », l’autre fêlé ? Pour cela, un peu de respiration, et je suis à vous pour la suite. Alors ! Qu’est-ce que c’est que l’image tridimensionnelle ? C’est tout bêtement une image en relief ! Mais vous allez voir que le « tout bêtement » peut se révéler extraordinaire ! Et pour une fois, l’expression n’est pas galvaudée ! Pour les savants et les techniciens qui en ont été les premiers témoins, cela a été aussi pétrifiant que pour Secondo Pià et ses plaques photographiques ! Je vous raconte l’anecdote dans le désordre et d’une manière plus épique que scientifique, mais pour cette dernière option vous pourrez vous reporter aux nombreux ouvrages savants qui ont traité du problème ! J’ai donc vu cette expérience dans un téléfilm dont le titre était : « Le témoin silencieux » qui datait de 1978 si mes souvenirs sont bons. Des techniciens d’un laboratoire d’optique avaient fabriqué des appareils de prises de vues spéciaux qui devaient prendre des clichés de la surface martienne, et ceci en relief afin d’en mesurer les dimensions. Un jour, un technicien désœuvré eût l’idée saugrenue de passer une revue hebdomadaire qui contenait l’image du saint suaire, et notamment la tête du Christ ! Il fit un saut de carpe en arrière qui fit sursauter à leur tour ses compagnons de labo ! Ce qu’il vit dans l’objectif de sa caméra, c’est une tête de Christ en relief ! Il faut bien comprendre qu’une simple photo d’identité ne donne qu’une image désordonnée dans un tel appareil ! Il faut que la photo ait été faite en « relief » d’abord ! Vous imaginez ce que cela signifie comme conséquence ? Il faut que le faussaire ait lui-même crée cette image en relief ! Impossible pour n’importe quel peintre ou dessinateur humain ! Aucun, je dis bien aucun artiste n’a réussi cet exploit ! S’il l’affirme, on peut le traiter de menteur sans complexe ! Encore la petite question récurrente : pourquoi un peinte faussaire du 14iéme siècle se serait-il cassé les pieds, avec des détails aussi complexes pour une masse de paysans incultes et illettrés ? Hum ? Depuis, des armées d’experts, de contre-experts, se font une guerre sans pitié à coup d’articles de presse, dans les revues scientifiques. Je vous signale, que dans cette extraordinaire histoire, je suis totalement neutre. Cet objet est un mystère en lui-même. L’Eglise le rejette pour une raison simple ; la Foi religieuse catholique et chrétienne en générale, ne repose absolument pas sur la vénération de reliques ! Les trois religions du Livre ; le Judaïsme, le christianisme, l’Islam rejettent, elles aussi, le culte des idôles, des images, et des reliques ! Alors ? Et si c’était une invention du Diable ? Mais çà, comme le disait déjà Rudyard Kipling, "Ceci est une autre histoire!" J’ai pensé qu’en cette période de Pâques, c’était une petite histoire qui était en situation avec l’époque de l’année. Joyeuses Pâques à toutes et à tous !


2 commentaires:

macis efisio a dit…

Merci , bizarre ton histoire.
Bien ta phrase et juste .
Portez vous bien .

Gérard GILBERT a dit…

Ah enfin! Après quatre longues années de silence!
"Vaut mieux tard que jamais"! Merci quand même!
Vous pouvez revenir plus souvent! Plus de cent histoires vous attendent!