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dimanche 29 juin 2014

LE BOURGET : un trésor familial



En prenant la grande enveloppe blanche que me tendait ma factrice, je ne me doutais pas, en l’ouvrant précautionneusement, qu’un flot de souvenirs familiaux allait me sauter à la figure concernant un aéroport légendaire et historique de la région parisienne ; Le Bourget !
Mon ancien employeur, ADP pour ne pas le nommer, par une délicate attention, m’invite à fêter le centième anniversaire de cette plate-forme aéroportuaire mythique.
Mais alors là…je vous arrête tout de suite ! Je ne vais pas faire l’histoire « scolaire » de cet aérodrome. Vous avez assez de documentations sur Internet pour trouvez tout ce qu’il vous faut à son sujet.
Non ! Moi, j’ai quelque chose de plus précieux et de plus intime à vous raconter ; ce sont tous les évènements familiaux, personnels, vécus dans cet endroit magique baigné par la passion aéronautique la plus pure. Vous allez voir ; cela ne manque pas d’intérêts non plus !

Chapitre I : le tonton « flingueur »

Tout a commencé bien avant la seconde guerre mondiale. J’avais un grand oncle paternel, donc le frère de mon grand-père, qui était tourneur fraiseur de son état, Comme lui, il était  ardennais et teigneux. On raconte même dans la famille, qu’il balançait sa « boite à outils » à travers la figure des patrons qui ne lui plaisaient pas ! Je ne pense pas que cette forme de « rupture de contrat de travail » serait encore valable aujourd’hui ! Mais ce qui le « sauvait » c’est qu’il était un spécialiste hors pair dans son métier, et qu’il finissait toujours par retrouver un employeur. Un jour, quittant ses Ardennes natales, il est embauché (après la perte d’une énième boite à outils) par un industriel aéronautique au nom prestigieux : René Couzinet.  
Je sens que beaucoup de mes lecteurs ne vont pas connaître le nom de ce grand ingénieur auquel la renommée des ailes françaises doit beaucoup ! C’est lui qui conçut les premiers appareils de transports de passagers dont le célèbre « arc-en-ciel » et dont Jean Mermoz en sera le pilote d’essai. Mon grand-oncle participa modestement, mais sûrement, à la mise au point de ces premières machines, et qui volèrent où ça ? Au Bourget ! Je garde, comme une relique à la valeur inestimable (pour moi) une photo dédicacée de René Couzinet où l’on voit le premier prototype de « l’arc-en-ciel ». Photo émouvante à plus d’un titre, car cet avion s’écrasa, lors d’une séance d’essai, mais à Orly ! C’était le « Couzinet 10 » déjà baptisé « arc-en-ciel » !
J’ai retrouvé une page relatant ce drame qui eut lieu le 8 août 1927 et qui tua tout son équipage. 

Mais si cette photo a été prise au Bourget, les avions, eux, étaient construits à Meudon où habitait mon parent. Je vous donne en mille, ce que construisait Couzinet au moment de son suicide, le 16 décembre 1956 ?

 UNE SOUCOUPE VOLANTE ! Authentique !

Voilà pour la première anecdote me rattachant à cette prestigieuse plate-forme aéronautique.


Chapitre II  Comme Charles Lindbergh

Très prétentieuse comparaison, vont penser certains ! Mais pas du tout ! Comme Lindbergh, se posant le 21 mai 1927, je venais, moi aussi, d’un autre continent où je suis né. Si un jeune américain fringant de 27 ans venait du continent américain, moi, je venait d’une grande île près du continent africain, du haut de mes deux ans. Il y a une plaque, sur le tarmac de l’aéroport, qui marque l’endroit exact où les roues du « Spirit of St Louis » touchèrent le sol de France. Il n’y a malheureusement pas de plaque là où l’ancien bombardier anglais « Halifax » qui m’emmenait de Madagascar où je suis né,  s’est posé dans le début des années cinquante. J’ai d’ailleurs relaté cette épopée dans un autre article : Adieu Madagascar

 Oui ! Le béton des pistes de cet aéroport fut le premier sol que je foulais de ma « mère  patrie » ! Vous comprendrez donc aisément que j’y sois attaché à cet endroit ? Et ce n’est pas fini !

Chapitre III Les grands « métinges » !

Toute mon enfance fut bercée du doux « ronrons » des moteurs à piston de mes chers oiseaux métalliques. Entre Villacoublay à l’ouest et Orly à l’est, le ballet des « constellation », des « dakota », des « DC4 », des « Toucans » (ex junker ju52) des « Noratlas 2501» hantèrent longtemps le ciel de mes nuits et de mes journées. Complètement « intoxiqué » par cette drogue aéronautique, adolescent, je fonçait comme un malade en manque, tous les deux ans, vers cette messe incontournable : Le salon international du Bourget. Depuis les années 60, j’en ai peu raté ! Mais celui qui m’a le plus  marqué  c’est celui de l’année 1961. Déjà, parce que ce fut l’unique fois où mon père m’y emmena, dans notre « glorieuse » et inoubliable 403 familiale noire. Il se passa un évènement extraordinaire ce jour-là  qui reste gravé dans ma mémoire. Alors que nous traversions Issy-les-Moulineaux, mon père me fit cette remarque étonnée :
_Tiens ? C’est bizarre ? Je passe tous les jours par ici, et je n’avais pas remarqué à quel point cette rue était en pente ? Et puis cette décharge publique ? Comment se fait-il que je ne l’aie jamais vue ?
Bref ! On poursuit notre chemin jusqu’au Bourget. Émerveillés, mon père et moi, nous assistons à un grand nombre de démonstrations aériennes. Notamment à celle du bombardier B58 « Hustler » qui venait de battre le record de vitesse de traversée de l’atlantique nord.
On rentre pénard à Châtenay-Malabry, et là on est accueilli par une mère affolée, au bord de la syncope, qui nous demande si nous n’avons pas écouté la radio. Je n’ai pas besoin de vous préciser qu’en 1961, les téléphones portables faisaient encore partie de la « science fiction » lointaine, et que les autoradios étaient encore réservés aux voitures de producteurs hollywoodiens.
Nous apprenons alors, avec une frousse rétrospective, que la rue « en pente » était dû au fait que d’anciennes carrières de gypse avaient eu la très mauvaise idée de s’effondrer quelques minutes avant notre passage, et que l’effondrement s’était poursuivi après. Vingt trois maisons furent détruites et quarante et une personnes périrent. Pour plus de détails, je vous renvoie à ce lien : La catastrophe minière de Clamart 
Mais ce n’est pas fini. Le B58 que nous admirions, deux jours plus tôt, s’est écrasé le dernier jour du meeting !
Il me faudrait encore tout un livre de souvenirs pour que je vous parle de ce salon du Bourget.

Chapitre IV Le Bourget militaire

Ce n’est pas sans une certaine tristesse, teintée de nostalgie que j’ai appris la fermeture de la base de Dugny. Bien que ne faisant pas partie du Bourget à proprement parler, elle en est tellement proche que c’est bien là que j’embarquais pour faire mon « service » en Algérie, sur la base de Bou-Sfer. Ce dont je me souviens le mieux, c’est qu’il faisait un froid sibérien, et même canadien, pour ne pas faire de jaloux. C’était un sombre matin d’hiver, baigné par les éclairages blafards des lampadaires léchant des bâtiments vieillots en meulières. Nous sommes montés à bord, avec mes compagnons d’infortune, dans cette antiquité indestructible que fut le « noratlas 2501 ».
Ma première surprise, mon premier choc émotionnel, survint quand l’équipage lança, les deux moteurs « Hercules » datant des années 30. Mon Dieu ! Mes oreilles n’avaient jamais supporté un tel boucan ! Je ne croyais pas cela imaginable ! Je ne vous parle pas non plus des vibrations de l’appareil qui donnaient la nette impression que l’avion allait se disloquait sur la piste en mille morceaux ! Une climatisation et un chauffage totalement inexistants, bien évidemment. Je vous ai parlé du bruit des moteurs, mais ce que je n’avais pas encore saisi, c’est qu’une fois aligné sur la piste, l’équipage lâcha les freins. L’ouragan sonore qui se déclencha alors, avec une puissance démoniaque, faillit me tuer sur place de.... trouille! Je n’étais, moi-même, plus que « son et vibration » ! J’avais l’impression d’avoir fondu littéralement dans les entrailles de cette machine du diable ! Heureusement, après le décollage, les choses s’améliorèrent un peu, mais pas la température. Autre chose cocasse à signaler sur cet appareil militaire au confort très …spartiate ; les toilettes ! Juste posées derrière un minuscule rideau et placées où ? C’est là que l’on voit toute l’ingéniosité de nos techniciens aéronautiques. Elles se trouvaient dans une des « portes coquilles ». Vous savez ? Celles qui s’ouvrent pour laisser passer les marchandises et le fret ! Pour ceux qui en ont déjà soulevé une, elles sont d’une légèreté et d’une fragilité étonnante. Voilà pourquoi, malgré un besoin physiologique tenace, je résistais à l’envie de m’y asseoir. La vision de cette porte se détachant dans le vide, et m’entraînant dehors sans parachute, me porta à retenir jusqu’à l’atterrissage un besoin de miction absolument torturant !
Cet aéroport allait encore m’accueillir pour le retour lors de mes deux séjours de « perm » en provenance de ma caserne algérienne. Mais cette fois-là, sur un autre appareil, lui aussi absolument extraordinaire, le Bréguet 760 « Provence » dit « deux ponts »!
Eh oui ! Jeune lecteur qui me lisez (peut-être) la France avait déjà construit un avion de transport de passagers à deux ponts, bien avant le glorieux et impressionnant « A380 » ! Ces deux voyages me permirent de tester tour à tour, les deux ponts. Le supérieur, aménagé en cabine normale, avec fauteuils confortables, et l’inférieur, en « soute à fret et bagages ».
C’est ainsi que par une volonté délibérée et une passion jamais en berne, je fis toute ma carrière professionnelle au sein d’Aéroports de Paris (ADP), mais à Orly, ce qui me permit quand même, et en autres avantages, de bénéficier de la gratuité des entrées à tous les salons aéronautiques qui suivirent, et jusqu à aujourd’hui.

Chapitre V Le musée

Le Bourget accueille depuis des années le musée de l’aéronautique. Voilà encore un point qui me rapproche de lui car j’ai déjà relaté, dans un autre article, (la petite porte du hangar)
 comment j’ai connu l’ancien lieu où il se tenait, c'est-à-dire dans un vieux hangar de Meudon, tout poussiéreux, dont  les trésors dormaient dans leur linceul de toiles d’araignées, et baignant dans l’odeur rance et fade des huiles de moteur. Je vous avais raconté, comment j'errais seul, du haut de mes douze ans, au milieu de tous ces trésors abandonnés, dans un silence de tombeau. Imaginez mon « amusement » quand il m’arrive de parcourir les nouvelles salles pimpantes où mes glorieux oiseaux pendent désormais dans des halls où bruisse une foule d’enfants émerveillés.
Que de chemin parcouru ! J’ai revu ce train d’atterrissage de l’avion légendaire de Nungesser et Coli
« l’oiseau blanc » ! La seule relique  qu’il nous reste d’eux après leur disparition dans l’atlantique. J’étais le premier à l’avoir contemplée, dans mon vieil hangar de Meudon.
Ce Meudon qui accueillit, lui aussi, tant de talents aéronautiques. Outre mon grand oncle, les ateliers de René Couzinet, mais aussi la célèbre soufflerie qui permit tant de progrès dans l’aérodynamisme.
Voilà pourquoi cet aéroport mythique est bien ancré dans ma vie, dans mes souvenirs. Je ne dois pas être le seul à partager cette passion pour cet endroit magique où travaillait un de mes plus chers copains, fauché à la fleur de l’âge, comme on dit d’une manière trop conventionnelle. Cet ami, qui m’avait accueilli dans son petit studio, en face de l’aérogare fut fauché par une voiture alors qu’il portait secours à une personne en panne sur l’autoroute A1.
Que ces quelques lignes lui soient modestement dédiées.


Photo du hangar de Meudon:






Le fameux train d'atterrissage de "l'oiseau blanc" de Nungesser et Coli

lundi 7 novembre 2011

Ô Stampe Ô mores Un avion mythique


Des avions « mythiques », il en existe des dizaines. C’est à la discrétion de ceux qui les considèrent comme tels, en fonction de leurs souvenirs et de leur goût. Le mien, c’est le « Stampe » Il m’est cher à plus d’un titre ce vieux coucou. Certains penseront que c’est une antiquité dormant sous la poussière d’un musée. Erreur ! Il vole toujours. Il est indestructible, il est éternel. Il est pourtant fait de toile et de bois. C’est un biplan conçu avant la seconde guerre mondiale, et par des Belges, de surcroît. Ce qui prouve que les Belges, à part la bière, les bandes dessinées et les blagues sont aussi capables de faire des avions. Et quel avion !
Il a formé des centaines de pilotes de toutes nationalités. Il a été l’avion des premiers émois aéronautiques pour bien des aviateurs professionnels qui en garderont un souvenir ému, même si au bord de la retraite, ils pilotent des 747 ou des A380. Car nous savons tous que les « premières fois » sont inoubliables ! Et pas seulement en aviation, si vous voyez ce que je veux dire. Bon ! Après cette petite mise en bouche, il serait temps que je vous parle de moi et de mon aventure « sentimentale » avec cet avion.
Je devais donc avoir douze ou treize ans. Mon père travaillait alors sur cette base aérienne Ô combien « mythique » elle aussi, de Vélizy-Villacoublay. Pour un raison simple c’est qu’il y était adjudant chef comptable dans l’armée de l’Air, et ce que nos contemporains, de moins de quarante ans, ne peuvent pas savoir, c’est que lorsqu’ils vont du petit Clamart sur Versailles, en roulant sur la « 186 », sur leur droite, ils observent une multitude de bâtiments divers d’une densité remarquable. Ils auraient beaucoup de mal à imaginer qu’à cet endroit, dans les années soixante, une splendide prairie verte s’étendait là, à perte de vue. Et que sur cet espace bucolique se trouvait un autre terrain d’aviation, mais privé, celui-là !
Mon père s’était lié d’amitié avec un vieux « forban » d’une cinquantaine d’année, à la chevelure blonde et ondoyante à la Mermoz et qui travaillait sur la base. Ce brave type avait la particularité d’être un pilote amateur. Et il pilotait, bien sûr, sur le petit terrain privé, le dimanche. Mon père ne tarissait pas d’éloge à son sujet. Une vraie passion. Allant même jusqu’à me raconter que son « héros » fit toute la guerre comme mitrailleur de queue sur B17, les fameux bombardiers américains. Je ne sais pas si cette histoire était vraie, mais elle m’impressionna fortement. Comme mon père connaissait ma passion pour l’aviation il eut l’idée géniale (pour moi) de me proposer un baptême de l’air dont son pote serait le pilote ! Vous pensez bien que cette idée me fit sauter de joie du haut de mes treize ans.
C’était plutôt un « faux » baptême, car à l’âge très modeste de deux ans et demi, j’avais déjà parcouru 12000 kilomètres dans la carlingue d’un « Halifax » vieux quadrimoteur bombardier que les Anglais (dans leur « immense » générosité) nous avaient refilé après la guerre pour palier à notre aviation civile exsangue. Nous revenions alors de Madagascar où je suis né. Mais comme je n’avais strictement aucun souvenir de ce premier voyage, ce vol représentait pour moi quand même le premier « conscient » et « vécu » Dire que j’étais rassuré et détendu serait un tantinet exagéré. J’avais quand même un peu les jetons. Je dois l’avouer humblement. C’est ainsi que j’arrivais, un beau matin froid et légèrement brumeux, sur ce petit terrain, en face du « grand » plein d'avions militaires, dans la 403 noire paternelle. Je vis alors un grand gaillard, costaud, au visage rigolard et malicieux, me tendre une paluche de déménageur. Il était d’un calme rassurant et posé. Très vite nous nous sommes dirigés vers « l’oiseau » de toile grise qui nous attendait sur le tarmac. Le « Stampe » est un biplace. Ce qu'il a de particulier c'est que le passager ou l'élève est à la place avant, et que le moniteur est derrière lui. Vu la petite taille de mon âge, on m'avait affublé,en guise de coussin d'un parachute qui ne m'aurait servi à rien en cas d'incident, mais qui me permettait de voir à l'extérieur comme les grands. Une fois coincé dans mon modeste habitat, je surveillais les préparatifs avec attention et angoisse. Quand le moteur se mit à pétarader et à ronfler, je fus stupéfait et un peu suffoqué par l'intensité du bruit auquel je dus, de force, m'habituer. Malgré le petit pare-brise de plexiglas installé devant moi, je ne pus me protéger d'une circulation d'air qui me donna l'impression d'avoir la tête à la portière d'une voiture roulant à cent à l'heure!
Et comme mes deux inconséquents d'adultes qui m'avaient organisé ce voyage n'avaient pas prévu de me donner un casque ou même un protège oreilles, je me suis farci une otite carabinée au retour qui abaissa mon acuité auditive de l'oreille gauche pendant des années.
Pour l'instant, l'avion fait des soubresauts incontrôlés sur une piste en herbes folles. La tonte du gazon n'ayant pas dû être faite depuis longtemps. Le bruit du moteur s'est encore accru en intensité, ce que je n'avais cru guère possible! Après une course de plus en plus chaotique j'ai senti que l'on se soulevait un peu, et puis brusquement tout s'est stabilisé. Nous étions en l'air!
Ah! La joie de voir la terre s'éloigner, les maisons se faire toutes petites. Nous avons survoler Meudon, ensuite, mon grand escogriffe de pilote a plongé sur Paris. Pas exactement! Mais comme je ne pouvais pas distinguer les limites de la capitale, je ne savais pas encore que son survol est formellement interdit à tout aéronef privé. En fin de compte, nous avons remonté la Seine au dessus de Suresnes et de Nanterre. Et là, j'ai encore le souvenir indélébile d'avoir pu admirer le CNIT, cette grosse étoile de béton, toute neuve, et non encore enchâssée de ses buildings d'affaire. Nous sommes revenus nous poser tranquillement. Bon, pendant trois jours j'ai hurlé comme un perdu, persuadé que l'entourage ne m'entendait pas! Mais quel souvenir.
Un autre souvenir, mais dramatique celui-là, et dont peu de gens ont le souvenir; c'est celui d'une collision dramatique d'un « Stampe » et d'un « SE 210 caravelle » en approche d'Orly.
Ce pauvre avion fut littéralement « scalpé » par le « Stampe » dont le moteur se retrouva sur les genoux d'un passager qui n'y survécut pas! L'appareil réussit néanmoins à se poser avec huit mètres de toit de carlingue en moins! Cela se passait le 19 mai 1960 et la compagnie était "Air Algérie". 

Mais je préfère me souvenir de mon « baptême », et lorsque je vis dans une brocante, la boite d'une maquette représentant mon glorieux biplan je ne pus résister. Maintenant, il trône dans une vitrine, accompagné de vénérables compagnons comme un « Caudron Simoun » un B17, un « Halifax » et des dizaines d'autres, le Concorde, deux A380, un 747, une « Alouette II », un « Puma 330 » le « Spirit off Saint-Louis », un hydravion japonais, un « Jap zéro » etc....

lundi 22 juin 2009

La petite porte du hangar

En cette année du centenaire du premier salon de l’aéronautique, il me revient un souvenir extraordinaire que j'ai vécu à l’âge de treize ou quatorze ans. Mon père connaissant ma passion pour le monde de l’aviation, en fit part à un copain à lui. Un jour, cet homme de confiance m’emmena dans sa voiture, encore rare en ces années d’après guerre, vers un endroit mystérieux et plein de secrets. La voiture garée, nous pénétrâmes dans un vaste champ envahi par des herbes folles et sauvages, que des jardiniers avaient déserté depuis fort longtemps. Au fond de cette « savane » bien de chez nous, se trouvait un immense hangar, haut comme une cathédrale. Du moins, c’est l’impression qu’il me fit à l’aune de mes treize ou quatorze printemps. Arrivé devant la façade de ce monument de brique et de tôle, je vis une petit porte tout à fait ordinaire dont la partie supérieure était vitrée de petits carreaux.
Mon tuteur d’un jour sortit de sa poche une grosse clé rouillée et se mit en devoir d’ouvrir l’huis de cette antre inconnue.
Ô mon Dieu ! Le choc que je ressentis alors, est encore présent, des décennies plus tard, au moment précis où je vous narre cette aventure. D’abord un silence sépulcral. Une lumière solaire tombant de grandes baies vitrées du toit. Une odeur de vieilles huiles, de poussières, et de cuirs. Et là, devant mes yeux éblouis d’enfant, toute l’histoire aéronautique de mon pays sous la forme de vénérables fantômes d’aluminium, de bois, de toiles, de verre et d’acier! Des nacelles en osier de dirigeables, grandes comme des autobus, pendaient du plafond ! Et je reconnus là, des trésors que j’avais déjà examinés dans mes précieuses revues d’aviation ! Des moteurs en étoiles, des vieux réacteurs ! Un énorme tuyau vertical : « l’ATAR volant » !
Un petit avion à moteur-fusée allemand, tout ramassé sur lui-même ! Le Messerschmitt 163, « Komet » Une rareté ! Les avions Leduc et leur poste de pilotage où le pilote était couché !
Et tout ça, pour moi TOUT SEUL ! Pas un chat ! Pas même une souris ! J’avais pour moi tout seul tous ces immenses trésors ! Ah ! J’étais le roi d’un jour ! Je courrais dans les allées ! La tête me tournait un peu ! C’était trop pour ma petite cervelle de gamin. Soudain, dans un coin, je remarquais un simple train d’atterrissage. Lorsque je lus la petite plaque explicative, placée entre les roues, mon émotion fut à son paroxysme. Il s’agissait du train d’atterrissage que Nungesser et Coli avaient largué, juste après leur décollage du Bourget, pour s’alléger, lors de leur tentative de traversée de l’Atlantique est-ouest en 1927 ! Ils disparurent en mer, le 9 mai de cette année-là. Et c’est tout ce qui restait ce drame. Leur bel avion s’appelait « l’oiseau blanc ». Et j’étais devant ses pattes, si j’ose dire ! Vous imaginez un peu ?
Tous ces trésors dormants comme la « belle » du même bois ? Bien sûr les années ont passé. Un magnifique et grand musée est né au Bourget que j’ai eu aussi le plaisir de visiter. Son directeur actuel Gérard Feldzer est un homme charmant et passionné, que j’admire et que je respecte beaucoup. Ancien pilote lui-même. Mais mon cher Gérard qui avez la chance (ou la malchance) de porter le même prénom que moi, qui dirigez un immense complexe plein d’avions et de fusées, vous n’aurez jamais le bonheur que j’ai eu, un jour, en franchissant la petite porte d’un hangar.

PS. Grace au web, j’ai retrouvé « mon » hangar » ! Il est situé à Chalais-Meudon. Et j’y apprends avec bonheur qu’il est en rénovation car c’est lui-même un monument historique trop longtemps méprisé. (Voir le lien)

-----> Photo prise au Parc de Sceaux le 20/09/2012! 
PS Un ajout de dernière minute que je dois à un internaute sur facebook au pseudo de piper pote: il a eu la bonté de me donner une photo du hangar tel que je l'ai vu.