Toutes les « madeleines de Proust » ne sont pas comestibles
Il s’en faut de beaucoup.
La mienne est apparu sous la forme d’un insigne de régiment qu’un éditeur proposait en collection.
Il s’agit de l’insigne du 2° R.E.P. « Deuxième Régiment Etranger de Parachutistes » Eh ! Oui ! La fameuse légion étrangère française ! Le premier n’existe plus pour la raison fort simple qu’il fit partie des putschistes du 22 avril 1961 ! Insurrection fomentée par le « quarteron de marchands de chaussures » comme les avaient surnommés De Gaulle, comprenant les généraux Challe, Salan, Jouhaud, Zeller ! Les hasards de l’existence, plus une administration militaire bornée et aveugle, firent que j’eus l’honneur, le plaisir et l’avantage de côtoyer ce prestigieux régiment lors de ses derniers mois sur le sol algérien qui le vit naître 150 ans plus tôt ! C'est-à-dire à Bou-Sfer, la base aérienne de l’enclave de Mers-El-Kébir ! C’est ainsi que j’assistai un jour à la dernière fête de « Cameron » (la fête des légionnaires) sur le sol de leur vraie patrie ; l’Algérie !
Il y avait aussi, avec nous (les gonfleurs d’hélice de l’Armée de l’Air) le 1° REC ! Autrement dit : Le 1° régiment étranger de cavalerie ! Ils avaient remplacé depuis longtemps leurs chevaux, par des jeeps porteuses de missiles sol-sol SS10. Missiles mis au point par un certain Bastien Thierry, jeune officier qui voulu faire la peau du général de Gaulle ! Maintenant, ils sont cantonnés du côté d’Orange, en France ! Notre garnison et la leur était simplement séparée par un rideau de barbelés symboliques mais quand même agressifs ! Une nuit fort sombre, alors que j’étais de garde « volante », je déplaçais, sans précipitation excessive, ma carcasse filiforme de sous-alimenté militaire(Ouais ! Je sais ! J’ai changé mesdames ! Pas la peine de me le faire remarquer !) le long de ces barbelés, mon « PM » inutile et sans munitions à l’épaule ! (Nous n’étions plus chez nous depuis cinq ans !) Un chant rauque et aux couleurs légèrement avinées me fit dresser l’oreille ! Il était là mon légionnaire !
Affalé sous le réverbère blafard !
Il n’était pas beau, et il ne sentait pas bon le « sable chaud » !
Sa grande carcasse reposait sous un lampadaire éclairant quelques mètres carrés de terre sèche et ocre.
Il se roulait consciencieusement une cigarette dans le papier d’un journal dont les lettres grasses étaient encore visibles.
Son visage était plus buriné que le canyon du Colorado !
_Ach ! Beudit Kon ! Abrauche! Alorsse Kamin! On draineuh!
Pas difficile de deviner qu’il n’était pas originaire du Poitou!
Survint alors la plus extraordinaire confession qu’aucun homme ne m’ait jamais faite !
Quel dommage que je n’aie pas eu de magnétophone ou que ma mémoire ne soit pas assez fidèle pour me relater tout ce qu’il me raconta cette nuit là, au son du cri des chacals (les vrais, ceux-là !)
Il était allemand. Il avait fait la bataille de Stalingrad.
Fait prisonnier par les Français, il s’enrôle dans la légion.
Il fait toute la campagne d’Indochine, Dien Bien Phu, les camps du viet-minh.
Il est libéré. On l’envoie en Algérie où il fait toute la guerre jusqu’en 1962 où son régiment vient se réfugier dans l’enceinte de Mers El-Kébir !
Dans ses yeux gris délavés passèrent tous les champs de batailles et les combats auxquels il participa, ponctué de forts éclats de rire à la Teutonne et d’une subtilité toute germanique ! Je ne sais pas si tout était vrai. Je n’avais pas les moyens de vérifier.
Mais il semblait si sincère et tellement désespéré dans sa solitude de vieux soldat qu’il cherchait « virilement » à me cacher, qu’il ne me vint pas une seconde à l’esprit qu’il pouvait me mentir !
Et qu’importe !
Il me reste dans les yeux et le cœur, l’image de ce vieux militaire fatigué, usé par les combats que son pays d’adoption lui fit faire sans vergogne pour une maigre solde, peu de remerciement, un peu de « bibine », et le mépris de beaucoup de mes compatriotes
en prime !
Nous, ils nous prenaient pour des gamins d’un patronage pour lesquels ils avaient beaucoup de tendresse et d’affection. Cela pouvait chatouiller la susceptibilité de certains de mes camarades, mais moi, je trouvais cela plutôt sympa !
De temps en temps, ils en « kidnappaient » un, en prévenant l’officier de garde, et nous le ramenaient au petit matin dans un état qui aurait scandalisé leur pauvre mère.
Mais ils allaient jusqu’à le faire vomir, à le déshabiller, et à le border dans son lit !
De vrais anges gardiens !
Mais pas question de passer au travers de l’une de leur « gentille » invitation !
Autre détail charmant : Il fallait un camion semi-remorque de cannettes de bière par semaine pour étancher la soif de nos « paisibles » voisins ! Fragiles du foie s’abstenir !
La Légion étrangère n’est pas faite pour vous !
J’ai encore mille anecdotes à leur sujet
dans ma besace à souvenirs !
Mais tout se mérite ! Un peu de patience !
Comme celle du fennec qui rôdait cette nuit là, près de nous, avec ses longues et larges oreilles !
Affalé sous le réverbère blafard !
Il n’était pas beau, et il ne sentait pas bon le « sable chaud » !
Sa grande carcasse reposait sous un lampadaire éclairant quelques mètres carrés de terre sèche et ocre.
Il se roulait consciencieusement une cigarette dans le papier d’un journal dont les lettres grasses étaient encore visibles.
Son visage était plus buriné que le canyon du Colorado !
_Ach ! Beudit Kon ! Abrauche! Alorsse Kamin! On draineuh!
Pas difficile de deviner qu’il n’était pas originaire du Poitou!
Survint alors la plus extraordinaire confession qu’aucun homme ne m’ait jamais faite !
Quel dommage que je n’aie pas eu de magnétophone ou que ma mémoire ne soit pas assez fidèle pour me relater tout ce qu’il me raconta cette nuit là, au son du cri des chacals (les vrais, ceux-là !)
Il était allemand. Il avait fait la bataille de Stalingrad.
Fait prisonnier par les Français, il s’enrôle dans la légion.
Il fait toute la campagne d’Indochine, Dien Bien Phu, les camps du viet-minh.
Il est libéré. On l’envoie en Algérie où il fait toute la guerre jusqu’en 1962 où son régiment vient se réfugier dans l’enceinte de Mers El-Kébir !
Dans ses yeux gris délavés passèrent tous les champs de batailles et les combats auxquels il participa, ponctué de forts éclats de rire à la Teutonne et d’une subtilité toute germanique ! Je ne sais pas si tout était vrai. Je n’avais pas les moyens de vérifier.
Mais il semblait si sincère et tellement désespéré dans sa solitude de vieux soldat qu’il cherchait « virilement » à me cacher, qu’il ne me vint pas une seconde à l’esprit qu’il pouvait me mentir !
Et qu’importe !
Il me reste dans les yeux et le cœur, l’image de ce vieux militaire fatigué, usé par les combats que son pays d’adoption lui fit faire sans vergogne pour une maigre solde, peu de remerciement, un peu de « bibine », et le mépris de beaucoup de mes compatriotes
en prime !
Nous, ils nous prenaient pour des gamins d’un patronage pour lesquels ils avaient beaucoup de tendresse et d’affection. Cela pouvait chatouiller la susceptibilité de certains de mes camarades, mais moi, je trouvais cela plutôt sympa !
De temps en temps, ils en « kidnappaient » un, en prévenant l’officier de garde, et nous le ramenaient au petit matin dans un état qui aurait scandalisé leur pauvre mère.
Mais ils allaient jusqu’à le faire vomir, à le déshabiller, et à le border dans son lit !
De vrais anges gardiens !
Mais pas question de passer au travers de l’une de leur « gentille » invitation !
Autre détail charmant : Il fallait un camion semi-remorque de cannettes de bière par semaine pour étancher la soif de nos « paisibles » voisins ! Fragiles du foie s’abstenir !
La Légion étrangère n’est pas faite pour vous !
J’ai encore mille anecdotes à leur sujet
dans ma besace à souvenirs !
Mais tout se mérite ! Un peu de patience !
Comme celle du fennec qui rôdait cette nuit là, près de nous, avec ses longues et larges oreilles !