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mercredi 20 mars 2013

Espion....couche-toi !

Vous aurez remarqué toute de suite, j'en suis sûr, l'espièglerie littéraire habituelle qui consiste à détourner le titre d'un film célèbre  d'Yves Boisset: « Espion, lève-toi ». Vous finirez par comprendre le « pourquoi » de la chose, si vous avez le courage ou l'amitié de suivre mon récit jusqu'au bout ! Ne me dîtes pas non plus, que vous n'avez jamais vu le film « La totale » où l'on voit un faux ingénieur des Télécoms, sous les traits de Thierry Lhermite, tromper « professionnellement » sa pauvre épouse jouée par Miou-miou. Celle-ci ne se doutant pas une seconde des activités d'espionnage de son mari au service de la France ! Petit film sympa que nos charmants camarades amerloques nous ont honteusement pillé, en en faisant une grosse machinerie hollywoodienne : « True Lies » avec Schwarzenegger et Jamie Lee Lewis. Dès qu'on a un scénario original, il faut immédiatement que ces « sauvages » nous le piquent ! Je ne dis pas que le film n'est pas une réussite méritée, mais quand même ! Vous vous demandez pourquoi je fais cette « intro » aussi tonitruante dans le monde de l'espionnage. C'est simple ; j'ai vécu, moi aussi, à mon modeste échelon, un peu de cette aventure à la « true lies » dans la grande entreprise aéronautique dans laquelle j'ai « sévis » pendant plus de trente ans. Est-ce dans mes gènes ou un penchant, au fond, assez commun, mais j'ai toujours été fasciné par le monde du renseignement et des espions. Je tiens peut-être aussi cela d'une grand-mère paternelle, s'ennuyant ferme dans ses Ardennes, qu'avait fui Rimbaud, un siècle auparavant pour les mêmes raisons, et qui collectionnait « religieusement » la célébrissime revue criminelle : « Détective » ! Revues qui s’amoncelaient dans le grenier de sa maison et que je parcourais pendant les journées pluvieuses des vacances de mon enfance. Comme le disait, d'une manière si charmante, Raymond Devos, dans un de ses sketchs célèbres, à propos de Saint-Simon ; ma chère « Mémère » avait la mémoire en trou de serrure et se passionnait pour toutes les affaires criminelles de son époque.Pour ajouter du « charme » à cette « tare » familiale, j'ai eu aussi, un grand oncle, toujours du côté paternel, qui m'avoua un jour, avoir fait partie de la DST à son origine. Il se vantait même, d'avoir eu pour mission d'ouvrir secrètement, à la vapeur, des courriers dangereux. Jetons un voile pudique sur ces confidences un peu suspectes car je les soupçonne fort d'avoir été inventées pour éblouir un garçonnet trop crédule ! Mais revenons, s'il vous plaît, à ma grande société aéronautique où je débarquais au début des années 70. Émerveillé par ce monde de l'aviation qui me passionnait, et qui me passionne toujours, je ne m'étais pas du tout rendu compte qu'elle pouvait abriter un véritable nid d'espions que l'on nomme parfois d'une manière élégante et un peu snob : « honorables correspondants » ! J'aurais dû pourtant m'en apercevoir assez rapidement à cause d'un incident survenu quelques années après mon embauche, quand je passais de mon service opérationnel sur les pistes, à celui, très nouveau et fascinant de l'informatique dans les sous-sols de l'aérogare d'Orly-Sud. J'avais là de nouveaux collègues, des supérieurs et un chef de service qui fleurait bon la Bretagne et les embruns, très sympathique avec sa tête ronde sortie tout droit du pays bigouden ! C'est à cette époque que survint une surprise, un tantinet désagréable, et qui me tomba sur le paletot sans crier gare ; j'étais convoqué par l'armée pour faire une période militaire de trois jours ! Plus de trois ans après la fin de mon service ! J'en avais plutôt gros sur la « patate » ! Non mais imaginez un peu ? Vous croyez en avoir fini avec l'armée, que c'est un souvenir qui s'estompe, et poum ! On vient vous cueillir pour recommencer le cirque militaire ! Et pas moyen d'y échapper !
Sinon, vous êtes considéré comme « déserteur » et les gendarmes partent illico à votre recherche.
Le copain qui a fait ses trois jours avec moi, les gendarmes sont allés le chercher aux Pays-Bas, à Amsterdam, où il était commercial pour une société ! Raccompagné en train, entre deux gendarmes !
Mais vous allez voir le plus étrange ; c'est que la « réserve » comme on l'appelle, et qui peut sembler nécessaire pour certaines fonctions délicates qui exigent un entraînement périodique, ne concernent quasiment que des officiers, ou des sous-officiers, à l'extrême rigueur. Jamais des « deuxièmes pompes » comme moi ! Et ben si !
Moi qui ne gagne jamais au loto, au tiercé, parce que je n'y joue jamais, là, j'avais décroché la timbale ! Moi, simple soldat, simple troufion, l'armée jugeait ma présence indispensable !
Et pas n'importe où,  s'il vous plaît ! Dans l'endroit le plus secret, le plus gardé, le plus mystérieux de l'époque ; le PC atomique souterrain de la base de Taverny, au nord de Paris. 
La base aérienne BA921 qui ne possédait aucun avion ! Et pour cause !
Je vous rassure tout de suite ; cette base n'existe plus et ses missions ont été transférées, si je suis bien au courant, du côté de Lyon. Donc, il y a prescription, et je peux en « causer » librement !
Alors, voilà-t-y pas que je débarque dans cette base, un lundi matin, en civil, bien entendu !
Ils n'ont pas poussé le vice jusqu'à nous rhabiller en militaires ! Un sergent m'emmène dans sa « jeep » à l'intérieur de cette caverne monumentale. Ce qui m'amuse, c'est que les « jamesbonderies » que j'ai vu au cinéma ne m'impressionnent plus du tout, à côté de ce que j'ai aperçu durant mes pérégrinations militaires. On croit que c'est une banalité de dire que la réalité dépasse la fiction ; ce n'est pas une banalité, et la fiction est toujours enfoncée!
Au bout d'un voyage interminable, passant de lourdes portes blindées, nous arrivons dans d'immenses salles de contrôles avec les cartes partout sur les murs, des consoles radars aussi nombreuses que dans une laverie automatique de la banlieue. Je me remets un peu de ma surprise. J'ai la tête qui me tourne. Je suis ébloui par tout ce qui m'entoure. Je suis encore dans cette disposition mentale lorsqu'une porte s'ouvre sur un type en uniforme de capitaine de l'armée de l'Air. Et là ! Oh  stupeur ! Mon chef de service d'Orly ! On reste tous les deux pétrifiés par la surprise !
_Vous ? Mais qu'est-ce que vous foutez là ? Me demande-t-il avec un grand sourire !
_Et vous ? Monsi.....Pardon ! Mon capitaine !
Je ne vous parlerai pas de ce que j'y ai fait. Déjà, parce que j'en ai la flemme, et parce que cela ne vous passionnerait probablement pas ! Le seul petit détail cocasse que je puis révéler et qui m'a beaucoup amusé, c'est que j'avais devant moi un panneau avec un tas de bouton rouge sous lesquels on pouvait lire des lieux précis, des endroits de Paris et de toute la région parisienne. C'étaient les boutons de commandes de toutes les grosses sirènes d' alerte qui sonnent une fois par mois à midi !
Ah ! Je vous vois venir ! Moi aussi, ça m'a démangé ! Mais je ne suis pas sûr que cela aurait été très apprécié par les « huiles » en uniformes autour de moi, et cela aurait eu pour conséquence de prolonger un séjour que je voulais plutôt écourter ! De retour à mon boulot d'informaticien, à Orly, je croisais souvent mon « capitaine » et nous avions un sourire de connivence comme ceux qui partagent un secret bien gardé. Ce qui m'étonnait aussi, c'était ses très nombreux voyages à l'étranger. Il se vanta même, un jour, de revenir de Chine ! Et croyez-moi, à l'époque, ce n'est pas aussi courant qu'aujourd'hui ! La partie de « ping-pong » sino-américaine qui scellait l'ouverture politique de ce pays était encore très récente. Mais je n'en saurais pas plus ! Il est même fort probable que je fantasme gravement sur une activité qui n'a jamais eu lieu. Et s'il l'apprenait, il serait sûrement le premier à se taper sur les cuisses de rigolade. Comme je vous l'ai déjà signalé, je me suis passionné depuis toujours pour le monde du renseignement. Mais le « vrai » ! Pas celui du cinéma ou de la littéraire. Bien que dans ce dernier domaine, celui qui s'en approche le plus est John LeCarré ! Forcément, il fut lui même un « honorable correspondant ». Voilà pourquoi je collectionne depuis longtemps certaines biographies intéressantes : William Colby, Vernon Walters, De Marenches, Roger Wybot, Leroy-Finville, Barril, ect...Rassurez-vous, je ne suis nullement dupe de la sincérité, un tantinet frelatée, de ces spécialistes du mensonge. Vous pensez bien, que ce qu'ils daignent nous raconter, est aussi insipide et délavé qu'un roast-beef anglais bouilli dans une sauce à la menthe ! C'est un joyeux « brouet » ou chaque mot est pesé pour ne pas révélé des secrets que le simple quidam ne doit jamais savoir ! Ce fut surtout vrai pour William Colby, ancien directeur de la CIA dont j'avais acheté et dévoré le livre. J'ai revu, très récemment, et par le plus grand des hasards, un documentaire télé qui lui était consacré. C'est ainsi que j'ai découvert (mais pouvait-il en être autrement) que ce cher « William » avait omis de nous raconter beaucoup de choses sur ses activités, notamment au Vietnam, et qui ne se trouvaient pas dans son bouquin. Malgré tout, je ne pouvais résister à mon petit « péché » mignon ! Dans ces montagnes de mensonges, il y avait peut-être une miette de vérité qui pouvait m'intéresser ? Allez savoir ? C'est ainsi que je fis l'acquisition du livre des mémoires d'Alexandre de Marenches, ancien patron de la DGSE dont le nom fleure bon la vieillesse noblesse française. Il est d'ailleurs assez cocasse de constater que nos « ci-devants » ont bien su, depuis cette dramatique époque révolutionnaire, se reclasser dans des postes prestigieux dignes de leur ancien rang : diplomatie, industries, politique, ect... « Chassez le naturel... ». Donc, je parcours son livre et soudain, je tombe sur un autre nom à particule ! Mais sur celui-ci, je vais rester discret. Car il me dit « vachement » quelque chose, celui-là ! Je le croise tous les jours au boulot ! D'accord ! Un nom ne veut rien dire ! Il y a plus d'un âne qui s'appelle Martin me rappelleront certains, d'une manière très vulgaire et déplacée. Mais le mien « d'âne » ne s'appelle pas Martin et son patronyme n'est pas courant, et surtout qu'il porte le nom d'un patelin de la région ! Il est le commercial (qu'est-ce que je vous écrivais plus haut?) d'une grosse société d'informatique, dont je tairais aussi le nom. Sa qualité professionnelle l'amène très fréquemment chez nous pour des contrats pharaoniques de matériels informatiques dernier cri. Et tout le monde sait que dans ce domaine, la valse des nouveautés n'a pas fini de tourner, même à notre époque.
Oh punaise ! Ce serait quand même....extraordinaire ? Non ! Je rêve ! Je fantasme ! Je vais me réveiller ! A chaque fois que je croise dans les couloirs ce monsieur très chic, très « vieille France », sa silhouette mince, « passe-partout, avec son costume gris clair et son gilet assorti, mon cœur rate un battement et il me brûle de l'apostropher.
Et puis un jour, sans crier gare, sans l'avoir voulu, Ô miracle ! Une occasion inespérée se présente.
Notre service, comme tout bon service informatique, possède un vaste atelier de reprographie où l'on fait force photocopies où l'on conditionne les listings sortis tout frais des imprimantes de nos gros ordinateurs, et où on va même jusqu'au massicotage et à la reliure de brochures diverses !
J'entre donc dans l'atelier pour une vulgaire petite photocopie. Dans la salle désertée pour cause de repas j'aperçois mon homme, seul, devant la photocopieuse. Alors là, c'est le moment ou jamais ! Je m'approche timidement de lui, et je lui sors tout de go :
_Pardon Monsieur de.... vous n'auriez pas un parent à la DGSE, des fois ? Oui, je sais ! Il faut être gonflé, inconscient, mal poli, indiscret, imprudent, et bien des choses pour avoir ce culot !
Mais que voulez-vous, ma curiosité et ma soif de connaissances ont toujours été chez moi, une maladie « orpheline » contre laquelle je n'ai jamais pu lutter victorieusement.
Et là, je vois mon homme faire le regard circulaire classique, que l'on voit dans tous les bons polars, dans tous les bons films d'espionnage, ou « l'indic » qui s'apprête à donner un renseignement capital, fait vachement gaffe pour savoir si personne d'autre ne vas écouter sa confidence. Il se penche vers moi, et me fait dans un murmure de connivence :
_Vous êtes de la « Maison » ?
Oh purée ! Le choc ! J'aurais reçu une décharge électrique de cent mille volts que je n'aurais pas été plus secoué ! Car ce terme de « maison » distillé comme un mot de passe convenu entre gens du même « club privé » me faisait comprendre que j'avais visé juste.
_N...on ! Non ! Bredouillais-je très rapidement et lamentablement. Et je m'empresse de lui expliquer le « pourquoi » de ma curiosité. Il se fend d'un large sourire, et me fait cette confidence qui ne me rassure pas du tout.
_Non, il s'agit de mon frère qui est le directeur du service « action » !
Hou ! La ! La ! Je me recroqueville mentalement de plus en plus ! Je serre les fesses beaucoup plus concrètement et je pense en mon for intérieur ; « mais qu'est-ce qui m'a pris de me mêler de ce qui ne me regardait pas ? ». Pourtant, mon interlocuteur, très affable et qui ne semble pas du tout gêné par mon indiscrétion, me fait l'insigne honneur de discuter le « bout de gras » sur cette « maison » qui semble fortement être aussi la sienne.
Étonnant non ? Et pourtant, parfaitement authentique. Je vous le jure ! Je me suis quand même retiré sur la pointe des pieds, les muscles fessiers toujours bloqués, en faisant une petite prière pour que mon interlocuteur éphémère n'aille pas raconter cette petite entrevue à son frangin. Dans ces milieux là, on ne sait jamais ce qui peut leur passer par la tête. Dieu merci, je suis toujours vivant ! Car je suppose que nous n'avons pas dû échanger des secrets vitaux pour la sauvegarde de la nation française. Ceci vous explique que mon milieu professionnel était quand même bien exposé à ce genre d'activités plus ou moins louches. Je me souviens aussi, quasiment à la même époque, d'un de nos chefs de service au profil plutôt bizarre. Déjà, c'était un ancien colonel de parachutiste. Si ! Si ! J'écris bien « colonel de paras » ! Ce qui ne l'empêchait pas d'être à la tête d'un service informatique. Il avait gardé de son ancienne activité militaire des réflexes et des tics assez « folkloriques ».
C'est ainsi que dans nos réunions hebdomadaires, il ne manquait, pour rappeler l'armée, que les casques lourds, les treillis et les cartes d'état-majors. Cela ressemblait plus à un briefing avant une action militaire qu'à une réunion de travail sur nos problèmes informatiques. Et nous attendions tous, avec gourmandise, la dernière et immuable phrase, de notre « chef de bataillon » en guise de conclusion :
Bon ! J'espère que tout le monde à les couilles claires ?
Et là, de nous esclaffer grassement et hypocritement comme tous les bons fayots d'employés vis-à-vis d'un supérieur.
Jusqu'au jour où il s'aperçut que parmi tous les mâles qui constituaient habituellement nos réunions se trouvait, pour la première fois, une représentante du sexe féminin. C'est bien la seule fois où nous l'avons vu rougir jusqu'aux oreilles en se fendant de plates excuses auprès de cette dame qui prit la chose avec beaucoup de joie comme vous pouvez vous en douter !
Que notre chef fut un ancien militaire, en soi, cela ne prêtait pas à fantasmer sur d'autres activités plus ou moins irrégulières, mais, mais, mais..ce que j'appris par les confidences d'un collègue était beaucoup plus suspect.
Celui-ci était vaguemestre et s'occupait du courrier interne de l'entreprise. C'est ainsi qu'il m'apprit que notre brave colonel l'envoyait souvent porter des lettres confidentielles dans divers ministères stratégiques de la république. Et qu'on aille pas me dire que cela concernait exclusivement « l'informatique » ! Ah ! Il s'en passe des « choses » sur nos belles plate-formes aéronautiques.
Ce qui est tout à fait logique quand on sait qu'elles sont ouvertes sur le vaste monde et que tant de monde s'y croise !
Pour conclure, si vous pensez que tout ceci sort de l'imagination débridée et irresponsable d'un romancier raté en peine d'attention, vous aurez raison ! Je ne tiens pas à avoir d'ennuis avec la....
« maison » !
Et l'espion très.... amateur que je suis, n'a plus qu'à aller se.....coucher !