Cela se passe au début des années 70 sur l’aéroport d’Orly.
En cette période de « plomb » sévit déjà un terrorisme venu du
Moyen-Orient qui n’a rien à envier à celui de notre époque. Et je dirais qu’il
est même encore plus actif. Un certain Carlos, de sinistre réputation, fait déjà
régner la terreur. Donc, nos belles plates-formes aéroportuaires sont
surveillées comme le « lait sur le feu » par des compagnies de CRS
sur le pied de guerre. Parmi ces fiers combattants de l’ordre, une jeune recrue
fait le pied de grue sur la rocade qui va d’Orly-Ouest à Orly-Sud. Cette rocade
qui forme un grand arc de cercle surplombe de quelques mètres les aires de
stationnement des avions. Notre jeune flic est engoncé dans sa capote trop longue
pour lui, de serge bleu sombre que nous connaissant tous. La casquette trop
grande, vissée sur son crâne juvénile rasé de frais, notre sentinelle se
bat les mains gantées par ce froid hivernal qui pince impitoyablement. Son, pistolet mitrailleur inutile lui bat les flancs.Pour
dire les choses franchement, il s’emmerde fermement à cent sous de
l’heure ! Pour se distraire un peu il regarde la grosse bestiole de
ferraille qu’il a sous les yeux ; un Boeing 747 de la compagnie
israélienne El Al flambant neuf, car ces avions sont récents à cette époque. Ce
point de stationnement s’appelle « delta zéro » car je ne peux
m’empêcher d’avoir la vanité puérile de me la « péter » un peu en
montrant mon expérience professionnelle déjà très lointaine.
Donc cette grosse
« vache » d’aluminium montre plutôt son cul d’où émerge un
« anus noir » qui siffle continuellement dans un chuintement
agaçant : L’APU ! Eh ! Eh ! Encore une occase de me la
« re-péter » pour vous dire que « l’APU » autrement
dit ; Auxiliary Power Unit est un petit réacteur qui fournit la puissance
électrique à l’avion quand celui est au sol, immobile. Voilà pourquoi notre
brave « gun-man » n’entend pas la grosse limousine noire qui vient de
stopper à dix mètres de lui, dans son dos. De celle-ci surgit un homme porteur
d’un long tube sombre sur son épaule. Poum ! Le bruit est presque ridicule.
Pas le temps de réfléchir, que la voiture repart à fond dans
un grand crissement de pneus martyrisés. Notre pauvre CRS médusé ne comprend
même pas ce qu’il vient de voir. Il regarde à nouveau vers l’avion où tout
semble normal. Les techniciens au sol continuent de s’activer comme si rien ne
venait de se passer.
-Bah ! J’ai dû rêver pense-t-il naïvement ! J’ai
mal dormi et le cassoulet d’hier soir n’est pas bien passé.
Ce n’est qu’une fois revenu au poste de commandement où le
souffle rageur d’un supérieur hurlant sa colère dans sa pauvre petite tronche
juvénile, en faisant gicler au passage, sa casquette du crâne, qu’il comprend
enfin la portée de l’incident qu’il vient de vivre.
Oui ! Car revenons sur ce malheureux « incident » ;
Figurez-vous que nos « artilleurs » ont raté
la grosse
« baleine » qu’ils avaient devant eux ! Ce qui s’appelle
positivement et sans aucune excuse : « rater une vache dans un
couloir » Plus mauvais tireurs que ça, ce n’est pas possible ! Mais vous allez
me poser LA question à « cent balles » ! Je le sens !
Curieux comme vous êtes. Si ces andouilles ont raté l’avion, quid de
l’obus ? Eh oui ! Il a bien fallu qu’il atterrisse quelque part cet
obus ? Oh mais où ! Passant par-dessus le satellite Ouest, il est
venu « gentiment » traverser de part en part un DC9 de la JAT
(ancienne compagnie de l’ex-Yougoslavie) qui était stationné en « Delta
sept » (je ne peux m’empêcher de me la péter) blessant légèrement trois
passagers. Et toujours sans exploser ! Vous pensez que cela s’arrête
là ? Pas du tout. Nous avions une belle cantine de piste avec une
magnifique grande baie vitrée qui donnait sur le taxiway. Sous cette belle
vitrine se trouve un petit soupirail au niveau du sol. Et ce petit soupirail à
quoi sert-il ? De fenêtre au vestiaire des employés. Et c’est là que les
artificiers sont venus chercher l’obus qui « reposait » gentiment sur
le sol en béton de la pièce. Toujours intact, bien sûr ! Juste en dessous
de la salle du resto ! Je ne sais pas qui leur avait refourgué la
camelote, à nos branquignols terroristes, mais à mon avis, leur S.A.V. a dû
s’en prendre plein la tronche.
Je ne sais pas ce jour-là ce qui nous a protégé : la
providence, la chance, Dieu ou je ne sais qui ou quoi, mais nous sommes passés devant
une catastrophe effroyable !
Quant à mon petit CRS, je ne sais absolument pas ce qu’il
est devenu. Gageons qu’il ait quitté un métier où sa « sensibilité »,
ou son « sang-froid », n’a pas été reconnu à sa juste valeur.
Pour vous prouvez que je n’invente rien et que cette
histoire est parfaitement authentique, je vous mets des informations
« glanées » sur Internet.
Le 13 janvier 1975 a lieu un attentat à
Orly. Des terroristes soutenus par le FPLP, avec Carlos à leur tête, tirent avec
un lance-roquettes sur un avion de la
compagnie israélienne El-Al, mais le ratent. Un
avion yougoslave est touché, faisant 3 blessés. La terrasse d'Orly Sud sera fermée
au public à la suite de cet événement.