vendredi 6 mars 2009

Bach attacks

Qui n’a pas vu le film de Tim Burton :
« Mars attacks » ?
Alors pour ceux qui l’auraient raté, il faut expliquer que de redoutables et très méchants martiens, totalement incultes et très cruels, sont anéantis par la voix d’une chanteuse, diffusée par haut-parleurs.
Leur cervelle éclate littéralement aux sons « harmonieux » de la mélodie. Vous pensez sûrement que Tim Burton a trop d’imagination, et qu’une telle chose est trop absurde pour arriver sur notre bonne vieille planète ?

Vous avez tout faux !

Ce que j’ai entendu ce matin, m’a plongé dans une hilarité envahissante, dont je ne suis pas encore guéri actuellement!
Voilà pourquoi, il me faut d’urgence vous la narrer, comme le malheureux, ayant un hoquet tenace, doit avaler un verre d’eau pour le faire passer.
Donc, figurez-vous, que dans ce beau pays lointain de Nouvelle-Zélande, un directeur de supermarché a retrouvé une paix « royale » depuis deux ans.
Plus de tags, plus de bandes de voyous agressant les clients, plus de vols, plus de dégradations imbéciles des locaux et des murs !
Car notre cadre avisé a eu une idée géniale :
Il diffuse toute la journée, sur les dizaines de haut-parleurs du centre commercial de……la musique classique !
Bach, Mozart, Vivaldi, et la voix merveilleuse de Kiri Te Kanawa
(célèbre cantatrice d’origine kanak) font fuir les jeunes délinquants aussi surement que les ultrasons chassent les insectes et les animaux nuisibles !
Etonnant non ?
Donc, non seulement la musique (la vraie !) adoucit les mœurs, mais, de plus, chasse les voyous, et même augmente la production des vaches laitières !
L’utiliser, c’est l’adopter !
Fort de cette expérience intéressante, je verrais bien les policiers, le haut-parleur braqué à la place du « tazeur » si controversé, menacer des bandits sortant d’une banque, après un hold-up !

« Sortez les mains en l’air ! Sinon, on vous envoie une rafale de fugue de Bach » !

Pire ! Ou plus cruel :

« Vous avez dix secondes pour sortir, sinon, nous diffusons une chanson de Tino Rossi » !

Le soldat en alerte ne criera plus :

« Halte ! Ou je fais feu ! »
Mais : « Halte ! Ou je chante du Mireille Mathieu » !

Quelle époque redoutable !
Quand on pense que nos gamins, nos petits « trésors » ne sont rassasiés que de « boucan », que de « bruits immondes » que des escrocs tentent de leur faire passer pour de la musique ! Certains vont encore me courir sur la prostate pour m’expliquer qu’il y en a pour tous les goûts ! Non, m’sieurs, dames !
De toute éternité, il y a eu le « bon » goût et
le « mauvais » goût !
Comme reconnaître celui qui est « bon » ?
C’est pourtant simple : c’est celui qui passe les âges, les sexes, les civilisations, les continents, les siècles, les mœurs, et les modes, sans jamais perdre une once de son charme, ni de son pouvoir de séduction.
Un air de flûte joué sur le bord du Nil, il y a de cela trois mille ans, nous ravira encore, quand il chassera des incultes et des « redevenus sauvages » des allées d’un supermarché !

lundi 2 février 2009

Le bonheur du poisson rouge

Un beau matin…
Beau ? Je n’en sais plus rien !
Je ne m’en souviens même plus, d’ailleurs! Mais comme c’est la formule consacrée ! Et pour être « consacrée » elle l’est vachement !
Bref ! Je me lève ! Et je ne bouscule pas ma femme, comme dans la chanson de l’électrocuté célèbre, vu qu’elle continue à ronfler, vu que c’est pas vrai, qu’il n’y a que les hommes qui le font ! C’est bien connu !
Donc, j’enfile ma robe de chambre, à défaut d’autre chose, et je descends à la cuisine !
Là, je prépare calmement le café, je fais du menu rangement, j’ouvre les volets du salon, de la cuisine. Je hume l’air du matin ! Je caresse tendrement le derrière de ma petite chatte…. !
Pas de fantasme débridé et malsain, s’il vous plait !
Il s’agit réellement d’une chatte (la femelle du chat) et de son réel derrière, c'est-à-dire de son petit cul surmonté d’une belle queue soyeuse ! Et je parle bien de la sienne !
Toujours être obligé de juguler les pensées salaces de mes contemporains !
Ah ! Je vous jure ! Quelle époque !
Bon ! Je continue donc mon petit ménage matinal. Je monte dans la salle de bain. Je me douche, je me brosse les dents, et c’est alors que je fais une constatation angoissante !
Une constatation terrifiante pour moi ! Vous ne voyez pas laquelle ?
Comme je vous connais, je suis sûr que non! Pas un brin d’imagination ! C’est désespérant !
Depuis que je suis levé, je n’ai pensé à rien !
Hallucinant, non ?
Oh je sais ! Pour beaucoup d’entre vous, c’est une situation tout à fait normale !
Mais pas pour moi !
Et le pire, c’est que j’ai trouvé cela vachement agréable !
D’habitude, au saut du lit, j’ai les trompes d’eustache agressées par les nouvelles du monde entier. Et comme ce sont toujours des catastrophes, des fait-divers bien pourris, bien « dégueux », des infos à vous flanquer le blues pour la journée, votre esprit part en pleine forme ! Bien dopé pour la joie et la bonne humeur nécessaire pour une bonne journée de travail!
Moi, qui suis un être très émotif et très sensible, je prends tous ces évènements au premier degré, en pleine poire !
C’est ainsi que je me lève, la tête farcie de problèmes « politico-métaphysico-socialo-mentalo-zintellectuels » vachement graves !
Je vous jette en vrac le sac poubelle qui se vide soudain dans mes neurones :
_Qui est le père de Rachida Dati ?
_Oui ! Je dois poster cette lettre pour la sécu de toute urgence !
_Louis XIV a-t-il eu raison d’écouter cette conne de bigote de Maintenon ?
_Tiens ! Line Renaud m’a agacé, hier soir, dans ce téléfilm à la con ! Pourtant, je l’aime bien Line, quand je pense qu’elle est passée de Franck Sinatra, à Dean Martin, sans oublier Samy Davis junior, à Las Vegas, pour terminer avec Dany Boon à Bergues !
Faut le faire ! Non ?
_Transformer le vice-roi de la Périchole d’Offenbach en « dictateur de pacotille », quelle idiotie !
_Va falloir que je change les essuie-glaces de la voiture !
Et c’est comme ça, toute la journée !
Je ne sais pas si c’est pareil chez vous, dans vos caboches, mais il me vient soudain des bouffées de colère où j’ai envie de hurler :
VOS GUEULES LA DEDANS ! ON NE S’ENTEND PLUS !
Et puis le calme revient !
Je croise alors le regard de ma petite chatte (toujours elle) ! Je me demande soudain ce qu’il y a derrière ses beaux yeux ronds et grands ouverts qui me regardent avec étonnement !
Le vide ? Quelques lueurs de sentiments ? Et je songe aux animaux, à l’évolution, à Darwin, et c’est REPARTI ! Fatiguant ! Epuisant !
D’ailleurs, il faut que l’on tue ici, un préjugé tenace !
C’est celui qui consiste à croire que les déprimés, les gens peu actifs ont la tête vide !
C’est exactement le contraire !
Il a été démontré scientifiquement, par des tests cliniques, que les encéphalogrammes de
Personnes fortement déprimées, présentaient une activité cérébrale intense !
Contradictoire ? Pas du tout !
Imaginez une voiture dont l’embrayage serait mort ! Qu’est-ce qui se passe ?
Le moteur s’emballe, ronfle furieusement, mais l’automobile n’avance pas d’un centimètre !
Pour le déprimé chronique, c’est exactement ça ! Son « embrayage mental » est mort !
C’est pourquoi, ceux qui travaillent trop de la « casquette » ne sont pas des plus actifs !
Et comme le résumait si bien Michel Audiard :
« Un con qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis ! »
Donc, pour être bien dans sa peau, être heureux, il ne faut penser qu’à ce qu’on fait à l’instant présent ! Et à rien d’autre !
« Ici et maintenant » comme disent les adeptes du Yoga !
Ne plus penser, voilà le vrai bonheur ! Ne plus avoir de mémoire non plus !
Parfois, quand je passe devant une animalerie, que je vois de beaux aquariums bariolés et pleins de bestioles aquatiques, je me mets à songer qu’elles n’ont que cinq secondes de mémoire !
Ah le bonheur du poisson rouge dans son bocal !

lundi 19 janvier 2009

Fric frac en famille !


Ce n’est pas que je sois très fier de ce que je vais vous raconter, mais cette cocasse aventure pourra rendre service à plus d’un d’entres vous ! Figurez-vous que mon fils possède un beau deux-pièces dans la commune voisine où nous habitons.
A la suite d’un dramatique accident de la circulation, celui-ci eut le pied broyé par la roue d’un autobus.
Mais comme nous avons les os solides dans la famille, il n’a pas eu de fractures !
Seulement un pied en compote, et il doit refaire ses pansements régulièrement.
Vous avez compris qui est l’ambulancier de service ?

C’est ma pomme, bien sûr !
Donc, j’arrive chez le fiston. Il se prépare.
Nous sortons dans le couloir au son des cannes anglaises s’entrechoquant et du brouhaha d’un début d’engueulade à propos de quelque chose dont j’ai totalement oublié le sujet depuis!
Je me retourne pour fermer la porte à double tour.
Celle-ci ayant déjà été refermée en la claquant, comme nous faisons tous !
Je ne m’inquiète pas, puisque j’ai la clef !
Mais……horreur !
Impossible de la faire tourner dans le canon!
Et c’est là, que mon charmant « bambin » de vingt cinq balais et du haut de son mètre quatre vingt cinq m’annonce qu’il a laissé ses propres clefs dans la serrure !
Tout ceci, avec un sourire désarmant de désinvolture et de sang-froid !
Arrrgh ! B.. el de M..de ! Pourquoi ai-je fais des gosses ?
C’est toujours dans ces moments là que l’on oublie les joies de la paternité !
Allez savoir pourquoi !
C’est vrai ! Au début, c’est mignon, ça réjouit la maman !
On se dit que l’avenir est assuré !
Que l’on va avoir un « retour sur investissement » ect… !
C’est qu’on oublie toujours le « service après-vente » et les « dégâts collatéraux » !

_Fils d’abruti ! Qui va payer le serrurier maintenant ? Hein !
Tu vas en avoir pour au moins 90 euros !

Là, son sourire s’est figé, vu que ses gènes en provenance du Limousin se sont réveillés brutalement !
Il n’y a pas que les Auvergnats qui soient rapiats !
Leurs voisins du plateau des mille-vaches aussi !
Moi qui vantais les mérites de cette belle porte costaude, sans poignée, avec même une planche sur le seuil pour que l’on ne puisse même pas y glisser une feuille de papier !
C’est elle qui se marrait maintenant !
« Tu peux toujours essayer de m’ouvrir, pauvre pomme ! »
Semblait-elle me dire !
Et comme nous sommes au deuxième étage, avec des fenêtres en double vitrage, tu peux courir pour passer par l’extérieur !
Ah le désespoir qui s’est abattu soudain sur nos épaules !
C’est dans le trajet en bagnole que m’est apparue la solution !
Les millions de films policiers et d’aventures à la con, visionnés au cours de mon existence, allaient enfin me servir à quelque chose !
Qui n’a pas vu Sean Connery, Pierce Brosnan, Roger Moore ouvrir la plus réfractaires des portes avec un bout de bristol ou une carte de crédit ? Hein !
Donc, plein d’espoir au retour de la clinique, et l’organe de mon fils bien bandé
(je parle de son pied, bien sûr !Mesdames ne rêvez pas !)
on s’est présenté devant cette ignoble porte dont l’insolence muette nous agaçait un brin ! Heureusement que la vie moderne nous procure un tas de cartes de crédits de toutes sortes, de toutes les couleurs, dont certaines ne servent strictement à rien, sauf à encombrer pendant des années, des porte-monnaie ou des portefeuilles, et qu’on finit par balancer à la poubelle, un soir de prurit de rangement !
Bref ! J’en trouve une, totalement inutile au commerce, et à tout service quelconque, mais assez souple pour me servir de
« rossignol » !
Et je commence alors mon travail de « malfrat amateur » en espérant qu’un voisin trop curieux, ne nous connaissant pas n’ait pas l’idée saugrenue et imbécile d’appeler « police-secours » ! Heureusement, nous sommes en pleine semaine, et au milieu de la journée !
Les locataires travaillent ! Et ils ont bien raison !
La carte à moitié bouffée aux mites, le découragement me gagne !
Le fiston prend la relève !
Wouah ! Ô miracle !
Un coup d’épaule, et la porte s’ouvre !
A ! Quel soulagement ! Ah quel bonheur de rentrer enfin chez soi !
Oui, mais tout de suite, l’abominable suspicion de la méfiance humaine reprend le dessus ! Comment de simples « amateurs » comme nous, ont pu réussir à ouvrir une porte aussi facilement et apparemment bien fermée ?
Car ce que nous avons fait, d’autres petits « malins » peuvent le faire ! N’est-ce pas ?
Alors, je comprends plusieurs petites choses essentielles que nous devons tous savoir devant ce genre de problème :

_Il ne faut JAMAIS laisser ses clefs dans la serrure, à l’intérieur de l’appartement !
_Il faut TOUJOURS fermer sa porte à double tour
_Que nous avons eu de la chance que le biseau du penne de la porte soit bien orienté vers nous !

_ Enfin qu’il ne faut pas se précipiter pour appeler le serrurier dans le cas que je viens de vous narrer !
Pas la peine de favoriser imprudemment une propension à l’escroquerie de la part de certains artisans !
Si vous voyez ce que je veux dire !

mardi 13 janvier 2009

Le festin de la colère

L’histoire que je vais vous raconter aurait pu faire l’objet d’une nouvelle de Guy de Maupassant, mais sûrement écrite avec beaucoup plus de talent que moi !
Il aurait adoré ce récit campagnard de la fin du 19° siècle.
C’était dans son registre, dans le domaine de sa sensibilité d’artiste !
Bien que Normand, le drame provincial d’une petite paysanne du Sud- ouest ne lui aurait pas été indifférent.
Car tout y était !
Le milieu paysan et pauvre. Une petite bourgeoisie vaniteuse, des amours « ancillaires », l’argent, l’honneur et la vengeance !
La petite paysanne pauvre et très jeune d’à peine seize ans, est mon arrière-grand-mère maternelle.
Je ne sais pas grand-chose d’elle ! Pas une image, pas un portrait, rien !
Seulement un prénom : Anna.
Et aussi le récit épique colporté dans la famille depuis des décennies, mais dont les détails se perdent dans la brume du temps.
Il ne reste qu’une trame essentielle sur laquelle l’imagination peut broder ses dentelles de sentiments.
Je ne pense pas que son histoire inspirera un opéra ou même un roman, et encore moins un film.
Elle ne fut pas Colomba, ni Carmen, ni la Dame aux Camélias, pas même Fantine ou encore moins Esmeralda ! Il s’en faut de beaucoup.
Non ! Simplement une petite gamine que des parents impécunieux placèrent dans une maison bourgeoise, auprès d’un jeune veuf d’une trentaine d’année.
Je n’ai pas le souffle du romancier pour vous décrire pendant des pages et des pages, la vie quotidienne de ces deux êtres placés l’un à côté de l’autre par les circonstances de l’existence.
Je laisse cela à Proust et autres « pisseurs de mots » !
Chacun joue sa « partition » comme il le peut !
Ma bisaïeule était forcément charmante ! On l’est souvent à cet âge ! Et puis l’orgueil familial l’exige !
Les hormones du jeune veuf fonctionnant normalement, on imagine aisément ce qui pouvait le travailler, ce brave garçon, lorsqu’il rentrait chez lui, le soir ! .
Sans besoin d’explications oiseuses et pour protéger la pudeur post-mortem de ma parente, je vous laisse deviner ce qu’il advint de cette promiscuité ancillaire.
En premier lieu, une charmante et belle passion amoureuse.
Du moins, mon terrible besoin de romantisme ne peut pas envisager autre chose !
Je n’ose pas imaginer qu’elle ne fut qu’un objet de consommation courante pour un jeune bourgeois libidineux !
Vivant quasiment comme un couple « normal » Anna a dû faire des rêves insensés !
Qui n’en aurait pas fait à son âge ?
Alors, est-ce un manque de connaissance ? Ou peut-être une imprudence ? Ou encore un acte volontaire et pleinement assumé?
Personne ne pourra jamais sonder l’âme de mon arrière-grand-mère pour le savoir !
Bref ! La nature se moquant des rêves, Anna tomba enceinte !
On ne sait pas si le jeune veuf accepta avec « enthousiasme » la nouvelle de sa future paternité !
Car c’est ici que se terminent mes certitudes ! Enfin, jusqu’au dénouement final, qui lui, est de nouveau bien connu !
Il est intéressant de constater que ce qui suivit, est du domaine de la spéculation la plus pure.
On peut d’ailleurs faire toutes sortes de scénarios pour envisager l’enchainement réel des évènements qui suivirent.
Anna a-t-elle annoncé très tôt son état à son amant ou a-t-elle gardé son « secret » le plus longtemps possible ?
A-t-elle été victime de promesses inconsidérées de la part du jeune bourgeois, ou a-t-elle exercé un chantage sur lui par cette maternité ? Nul ne le sait !
Il est une autre certitude pourtant, et que j’avais oubliée au passage, c’est que le veuf annonça bientôt son remariage avec une jeune bourgeoise issue d’une bonne famille de la région, comme il se devait, bien sûr !
Comment et quand annonça-t-il la nouvelle à ma bi-aïeule ? Mystère !
Sans avoir fait une licence de psychologie, ni d’avoir lu, dans son entier, « la comédie humaine » de Balzac, on peut comprendre le désespoir abyssal qui dû saisir la pauvre enfant, et future maman de surcroit.
Car on ne plaisantait pas, autrefois, avec les « filles perdues » qui avaient vu « le loup » avant d’être passé devant Monsieur le curé ! Et qui plus est ; avec un enfant du « péché » !
Le déshonneur, le chagrin, la honte, et même la misère ! Voilà ce qui attendait Anna !
Comment ma pauvre parente surmonta ce chagrin ? Là aussi, c’est un mystère !
Il fallut bien que l’amour de la vie lui soit terriblement chevillé au corps pour qu’elle n’eut pas la tentation de commettre l’irréparable ! Sa tendre jeunesse, peut-être ?
Le jour de la belle noce bourgeoise arriva ! Tout le village était en fête ! Pardi !
Que l’on soit pauvre ou riche, un mariage à cette époque, et encore plus que maintenant, c’était une manifestation festive qui emportait toute une petite communauté, au-delà même des propres familles ! C’était un véritable évènement.
Quant à ma pauvre Anna, il est une certitude, c’est qu’elle était sur les lieux du banquet.
Comble de l’ironie cruelle de l’existence, elle participait, avec une foule de petites « esclaves » comme elle, à sa préparation !
Celui-ci se trouvait en plein air, apparemment dans une grande cour de ferme, par un magnifique soleil d’été faisant éblouir les nappes immaculées sur lesquelles s’étalait une vaisselle de riche où resplendissaient l’argent et le cristal !
Ah ! On n’est pas « bourges » pour rien !
Et une noce est bien le moment le plus propice pour étaler ses richesses !
Et puis, tout le monde est parti à l’église ! Strictement tout le monde ! Seule Anna est restée !
C’est marrant, mais je l’imagine bien, le front appuyé à la vitre de la cuisine, en train de regarder, songeuse, toutes ces agapes destinées au bonheur d’une autre !
Pendant ce temps-là, la messe se déroulait pieusement à l’église, au son de l’orgue vénérable qui en avait vu tant d’autres !
Ce fut comme toutes les messes de mariage : long et chiant, avec la marmaille qui pleure et les portes qui claquent à cause des retardataires !
La noce est sortie sous le carillon des cloches sonnant à toute volée grâce un bedeau déjà pompette, les poches pleines de monnaie et de billets !

C’est lorsqu’elle déboucha dans la cour de la ferme que les visages se figèrent d’effroi !
Les tables étaient vides !
Mais vides à un point ! On ne voyait plus que la surface de leurs belles planches en bois !

Il faut vous dire, qu’au milieu de cette cour, juste au centre du cercle formé par les tables, se trouvait un puits magnifique.
Un puit, avec une belle margelle ! Et d’une profondeur !
« Oh coune dé boune dille », comme on dit là-bas ! (Traduction phonétique bien sûr !)
Le gouffre de Padirac ! Pas moins !

Ah ! On savait faire les puits à cette époque là !
Et puis des nappes, c’est tellement commode pour y jeter des objets dedans!

L’épilogue de cette histoire familiale (et authentique !) c’est qu’Anna rencontra tout de même, un brave homme qui l’épousa, reconnu aussi sa petite fille qu’il éleva comme la sienne.
Quand je pense que j’ai peut-être des chromosomes d’un enfoiré de bourge ?
Terrifiant, n’est-il pas ?
Ce qui prouve que l’on ne peut pas maitriser ses origines, mais simplement les subir !
Pourquoi vous ai-je raconté cette histoire qui aurait dû rester secrète ?
L’impudeur de l’écrivain ou le désir d’une âme oubliée qui veut que son arrière-petit-fils
Raconte son exploit pour ne pas que les vivants oublient qu’une mauvaise action se paye toujours ?
C’est aussi pour montrer que les « timides » ou les « faibles supposés » peuvent avoir des colères froides aux conséquences ravageuses !
Et dire que j’ai peut-être son caractère !

mercredi 12 novembre 2008

Les gaietés de la volante

Ne vous faites pas de cinoche !
La « volante » n’était que la garde militaire que je dus accomplir pendant mon exotique séjour en Algérie.
Cela consistait à se trimbaler la nuit, sur tout le territoire de notre casernement, une lampe poche à la main, en treillis bien sûr, et « armé » d’un pistolet mitrailleur Mat49 !
Quand j’écris « armé », il faut que je vous fasse une petite digression qui vous expliquera en quoi consistait ce redoutable « armement » !
Comme nous étions sur un territoire étranger depuis 1962, nous n’avions pas le droit d’avoir de munitions.
C'est-à-dire que mon pistolet n’avait pas de chargeur !
J’étais un peu comme un eunuque dans un harem de Bagdad au temps de Shéhérazade !
Je sais que l’image est osée, mais c’est pour mieux vous faire comprendre la situation. Si, par le plus grand des hasards, un abruti de voleur autochtone, un « terroriste » avait eu l’idée complètement démente de nous chercher des noises, je devais dire ceci :
« Halte ! Qui va là ? »
Mais je n’aurais pas pu dire « halte ou je fais feu ! »
Parce qu’il m’aurait fallu alors courir ventre à terre au poste de police.
Là, j’avertissais mon chef de poste, de la situation.
Lui-même dûment informé, devait réveiller l’officier de semaine qui lui, conformément aux instructions, réveillait le colonel commandant la base.
Le colonel n’écoutant que son devoir, téléphonait au centre interarmes de Mers-el-Kébir. Celui-ci, émettait en direction du ministère des armées à Paris, un avis d’alerte afin de prévenir le Ministre!
On réveillait celui-ci, chez lui ou dans le boxon dans lequel il honorait une hétaïre, pour l’informer de la situation.
Avec l’humeur rogne qu’on peut facilement deviner, il réveillait l’ambassadeur algérien de la capitale pour lui demander son avis.
Avis autorisé ou pas qui repartait en sens inverse, avec toutes les étapes déjà précitées !
C’est alors seulement, que le caporal de garde m’ouvrait le coffre dans lequel se trouvaient les précieux chargeurs.
Dûment équipé de ces redoutables munitions, je re-fonçais faire sa fête à l’imprudent qui avait ainsi dérangé tant de monde !
Même quelques neurones se battant en duel dans une cervelle vide suffiraient à comprendre que le « perturbateur » ayant perdu patience, ne m’aurait pas attendu !
Après tout le mal que l’on se serait donné ?
L’ingrat !
C’est vous dire si ces gardes étaient vachement importantes !
Comme toujours, les plus grands dangers viennent souvent de chez vous ou des vôtres!
Car un jour, je vis une énorme boule de poils me foncer de dessus, à la vitesse de l’éclair et dans un silence que même un sourd ne connaît pas !
Deux yeux brillants de sauvagerie me fixaient impitoyablement.
J’esquissais à peine un huitième de tour sur moi, pour fuir !

« NE BOUGE PAS ! SINON IL TE BOUFFE ! »

Cette phrase, hurlée dans le noir eut l’effet escompté !
Même un scorpion dans mon falzar ne m’aurait pas fait bouger d’un millimètre !
Et quand il parlait de « bouffer » le maître chien ne plaisantait pas !
Sa gentille « bébête » était entraînée à tuer !
Plus efficace que les balles « virtuelles » de mon P.M. !
Le « gentil » cador me renifla les pompes pour voir si la viande qui se trouvait à l’intérieur pouvait soutenir la comparaison avec sa délicieuse boite de « canigou » habituelle.
Le test dû être négatif, car il se coucha au pied de son maître et montra une indifférence totale pour notre conversation qui suivit ce moment d’intense émotion !
Donc, après cet incident, comme les bêtes sauvages se dirigent vers leur point d’eau, comme les renards retrouvent leur terrier, comme les vaches leurs étables, je me dirigeais instinctivement vers le bâtiment de ma chambrée.
En passant par derrière, je vis la clarté de la fenêtre grande ouverte, comme à l’habitude pendant ces soirées torrides de l’été africain.
La partie de poker faisait rage !
Le brouillard de la fumée des clopes montrait que les choses étaient entamées depuis déjà pas mal de temps! Un copain m’apercevant, me héla !

_Eh Gilbert ! Un p’tit « poke » ! ça te dit ?
_Tu vois bien que je fais ma ronde !
_Balise pas comme une gonzesse, et fais pas chier ! Viens tout de suite !

« Baliser » en argot de l’époque, signifiait : avoir peur !
Ne me demander pas l’origine ! Je n’en sais rien !
Bon ! L’homme étant faible, je rejoignis mes potes et m’installais à la table, en prenant mes cartes.
Ah ! Quelle belle partie !
Jamais nous n’avions été aussi joyeux, délirants, rigolards et détendus !
Il y avait là mon viking normand et ses fossettes insolentes, mon petit « Astérix breton » et ses yeux pétillant de malice, mon « ch’ti » et sa moustache auréolée de mousse de bière !
Mon bordelais de Bègles, et ses tâches de rousseurs ! Enfin, toute la France profonde !

GILBERT ! QU’EST-CE QUE TU FOUS-LA ?

Je me levais et me retournais brusquement vers la porte, les cartes encore à la main !
Horreur !
Mon chef de poste était là, dans l’encadrement, tel la statue du Commandeur !
Pétrifié de honte que j’étais !
Mais mon calvaire ne faisait que commencer. Je me précipitais vers mon lit où j’avais laissé mon arme !
Aïe ! Aïe ! Aïe ! Ah les salauds ! Ah les vrais fumiers ! Ah les traîtres !
Ces enfoirés de copains
(mais devais-je encore les appeler « copains « ?)
m’avaient entièrement démonté mon pistolet mitrailleur,
dont toutes les pièces étaient admirablement bien rangées sur mes draps blancs !
Déjà, remonter un pistolet mitrailleur ce n’est pas coton, surtout quand on n’en a pas l’habitude, mais se farcir le feu nourri des « joyeusetés », des conseils « amicaux » d’un sergent furibard, je vous jure que c’est un grand moment de solitude !
Une semaine d’arrêt de rigueur !
Et à ramasser les poubelles, tous les matins, avec le camion benne !
C’est pourquoi, même aujourd’hui, quand je suis réveillé sauvagement par le ramassage des ordures, à des heures pas chrétiennes, j’ai quand même une pensée amicale pour les ouvriers qui font ce difficile boulot, et même sans être punis, eux !
Quand je pense que j’avais un full par les as ! Je n’ai jamais eu de pot au jeu !
Mais le plus triste, le plus navrant, c’est de savoir que mes pauvres enfants ne connaîtront Jamais ces moments d’intenses « camaraderies », ces émotions « viriles »,
ces situations « géniales » que des médisants croient « ubuesques » mais qui nous permettent d’avoir de si beaux souvenirs de nos services militaires d’autrefois !

mardi 11 novembre 2008

Une non déclaration d’amour

Oh que non ! Bien sûr que non !
Je ne t’aime pas !
Je ne t’ai jamais aimé ! Je refuse de toutes mes forces cette niaise idiotie !
Quoi ? Cette obscénité qui consiste à être esclave de ces sentiments hideux, gluants de stupidité soumise?
Quelle horreur ! Quelle déchéance ! Quelle veulerie !
J’ai failli me faire avoir par ton charme, ta jolie frimousse, et ta chevelure bouclée.
Heureusement ton corps ne m’attire pas ! Ta poitrine me laisse sage ! Tes longues jambes trop maigres, totalement indifférent !
Tu n’as même pas de fesses ! De ces jolies rotondités qui piègent les hommes trop vulnérables aux charmes des déesses callipyges !
Seuls la grâce de tes mains virevoltantes, comme des oiseaux de paradis, m’a envoûté traîtreusement, et le son de ta voix ensorcelante ont failli m’endormir du sommeil de l’hypnose provoqué habillement par la vraie sorcière que tu es !
Mais j’ai su vaincre ce charme redoutable.
Tel Ulysse attaché au mat de son navire, j’ai su repousser, loin de mon âme troublée, la Sirène perverse qui m’attirait de ses appâts vénéneux!
Tu n’auras jamais mon cœur !
J’ai su fuir à temps, pour me sauver de ton pouvoir maléfique ! Ton pouvoir de diablesse !
Dans cette redoutable épreuve, je fus aidé par un miracle divin !
Tu ne m’aimes pas non plus !
Mieux ! Beaucoup mieux !
Je te suis complètement indifférent ! De cette belle indifférence qui sait tuer dans l’œuf tout sentiment !
Ouf ! Quel soulagement !
Quel épouvantable malheur s’il en avait été autrement !
« L’amour est la seule bataille que l’on gagne par la fuite » a dit Napoléon.
J’ai su fuir à temps !
J’ai gagné ! Je suis heureux ! J’ai vaincu cette gorgone redoutable !
Et j’ai reconquis durablement cette joie immense, ce privilège des dieux, cette liberté sans prix :
Etre seul !


PS. Ce « poulet » noir n’est qu’un exercice de style ! Bien évidement !
« Toute ressemblance avec des personnages ou des faits ayant existé, ne serait que pures coïncidences ! »

samedi 8 novembre 2008

La pie et le matou

Il serait amusant de savoir ce qu’aurait pu nous écrire, comme belle fable, notre cher La Fontaine, au spectacle qui me fut offert, un matin d’été ensoleillé, alors que j’ouvrais les volets de ma cuisine.
Sur le sol de la rue, à une vingtaine de mètres en face de moi, s’étalait la fourrure sombre d’un vieux matou, au regard féroce, mais au caractère fort débonnaire.
Il était là, dans la position du sphinx, dans une immobilité majestueuse.
Ce brave chat avait bien du mérite de rester aussi placide, car en face de lui, que vis-je de mes yeux incrédules, et encore englués de sommeil ?
Ce qui me permit de douter un moment de la réalité de ce que je voyais !:
Une pie !
Mais une pie qui, contrairement ce que dit le dictionnaire ne
« jacassait » pas, mais engueulait proprement notre félin à coup de cris sauvages, à dix centimètres de ses moustaches !
La queue dressée vers le ciel, le bec pointant vers le fauve miniature, les pattes bien plantées sur le sol, cela faisait furieusement penser à une scène de ménage.
Je n’ai pas besoin de vous préciser qui faisait l’épouse acariâtre
et où se trouvait le « mari » résigné !
Pensant que « l’époux » ne prenait pas assez au sérieux ses reproches justifiés, miss « bonbon » se mit à tourner autour de lui, en sautillant hystériquement, tout en continuant, bien sûr, son concert strident et courroucé!
C’est alors que je vis Raminagrobis, se plaquer au sol, les oreilles rabattues, et l’air plus furieux que d’habitude !
Je me suis dit :
« Voilà un petit déjeuner sur canapé et à plumes qui se prépare pour
notre moustachu excédé ! » !
Mais non !
Jugeant la « donzelle » un peu trop maigre à son goût ou un peu trop « casse bonbons »
notre « Pomponnet » se redressa lentement, s’étira langoureusement, puis se mit en marche du pas des honnêtes gens, qui n’ont ni soucis ni problèmes!
La queue en point d’interrogation, il se retourna une dernière fois pour voir sa tortionnaire sonore, en ayant l’air de lui dire en guise d’adieu :
« ça m’en touche une, sans faire bouger l’autre ! »
Selon une pensée immortelle proférée par un de nos grands hommes politiques !
Quant au motif de la colère de notre corvidé, nul n’en saura jamais rien !
Mais avec les femmes, allez savoir !