mercredi 12 novembre 2008

Les gaietés de la volante

Ne vous faites pas de cinoche !
La « volante » n’était que la garde militaire que je dus accomplir pendant mon exotique séjour en Algérie.
Cela consistait à se trimbaler la nuit, sur tout le territoire de notre casernement, une lampe poche à la main, en treillis bien sûr, et « armé » d’un pistolet mitrailleur Mat49 !
Quand j’écris « armé », il faut que je vous fasse une petite digression qui vous expliquera en quoi consistait ce redoutable « armement » !
Comme nous étions sur un territoire étranger depuis 1962, nous n’avions pas le droit d’avoir de munitions.
C'est-à-dire que mon pistolet n’avait pas de chargeur !
J’étais un peu comme un eunuque dans un harem de Bagdad au temps de Shéhérazade !
Je sais que l’image est osée, mais c’est pour mieux vous faire comprendre la situation. Si, par le plus grand des hasards, un abruti de voleur autochtone, un « terroriste » avait eu l’idée complètement démente de nous chercher des noises, je devais dire ceci :
« Halte ! Qui va là ? »
Mais je n’aurais pas pu dire « halte ou je fais feu ! »
Parce qu’il m’aurait fallu alors courir ventre à terre au poste de police.
Là, j’avertissais mon chef de poste, de la situation.
Lui-même dûment informé, devait réveiller l’officier de semaine qui lui, conformément aux instructions, réveillait le colonel commandant la base.
Le colonel n’écoutant que son devoir, téléphonait au centre interarmes de Mers-el-Kébir. Celui-ci, émettait en direction du ministère des armées à Paris, un avis d’alerte afin de prévenir le Ministre!
On réveillait celui-ci, chez lui ou dans le boxon dans lequel il honorait une hétaïre, pour l’informer de la situation.
Avec l’humeur rogne qu’on peut facilement deviner, il réveillait l’ambassadeur algérien de la capitale pour lui demander son avis.
Avis autorisé ou pas qui repartait en sens inverse, avec toutes les étapes déjà précitées !
C’est alors seulement, que le caporal de garde m’ouvrait le coffre dans lequel se trouvaient les précieux chargeurs.
Dûment équipé de ces redoutables munitions, je re-fonçais faire sa fête à l’imprudent qui avait ainsi dérangé tant de monde !
Même quelques neurones se battant en duel dans une cervelle vide suffiraient à comprendre que le « perturbateur » ayant perdu patience, ne m’aurait pas attendu !
Après tout le mal que l’on se serait donné ?
L’ingrat !
C’est vous dire si ces gardes étaient vachement importantes !
Comme toujours, les plus grands dangers viennent souvent de chez vous ou des vôtres!
Car un jour, je vis une énorme boule de poils me foncer de dessus, à la vitesse de l’éclair et dans un silence que même un sourd ne connaît pas !
Deux yeux brillants de sauvagerie me fixaient impitoyablement.
J’esquissais à peine un huitième de tour sur moi, pour fuir !

« NE BOUGE PAS ! SINON IL TE BOUFFE ! »

Cette phrase, hurlée dans le noir eut l’effet escompté !
Même un scorpion dans mon falzar ne m’aurait pas fait bouger d’un millimètre !
Et quand il parlait de « bouffer » le maître chien ne plaisantait pas !
Sa gentille « bébête » était entraînée à tuer !
Plus efficace que les balles « virtuelles » de mon P.M. !
Le « gentil » cador me renifla les pompes pour voir si la viande qui se trouvait à l’intérieur pouvait soutenir la comparaison avec sa délicieuse boite de « canigou » habituelle.
Le test dû être négatif, car il se coucha au pied de son maître et montra une indifférence totale pour notre conversation qui suivit ce moment d’intense émotion !
Donc, après cet incident, comme les bêtes sauvages se dirigent vers leur point d’eau, comme les renards retrouvent leur terrier, comme les vaches leurs étables, je me dirigeais instinctivement vers le bâtiment de ma chambrée.
En passant par derrière, je vis la clarté de la fenêtre grande ouverte, comme à l’habitude pendant ces soirées torrides de l’été africain.
La partie de poker faisait rage !
Le brouillard de la fumée des clopes montrait que les choses étaient entamées depuis déjà pas mal de temps! Un copain m’apercevant, me héla !

_Eh Gilbert ! Un p’tit « poke » ! ça te dit ?
_Tu vois bien que je fais ma ronde !
_Balise pas comme une gonzesse, et fais pas chier ! Viens tout de suite !

« Baliser » en argot de l’époque, signifiait : avoir peur !
Ne me demander pas l’origine ! Je n’en sais rien !
Bon ! L’homme étant faible, je rejoignis mes potes et m’installais à la table, en prenant mes cartes.
Ah ! Quelle belle partie !
Jamais nous n’avions été aussi joyeux, délirants, rigolards et détendus !
Il y avait là mon viking normand et ses fossettes insolentes, mon petit « Astérix breton » et ses yeux pétillant de malice, mon « ch’ti » et sa moustache auréolée de mousse de bière !
Mon bordelais de Bègles, et ses tâches de rousseurs ! Enfin, toute la France profonde !

GILBERT ! QU’EST-CE QUE TU FOUS-LA ?

Je me levais et me retournais brusquement vers la porte, les cartes encore à la main !
Horreur !
Mon chef de poste était là, dans l’encadrement, tel la statue du Commandeur !
Pétrifié de honte que j’étais !
Mais mon calvaire ne faisait que commencer. Je me précipitais vers mon lit où j’avais laissé mon arme !
Aïe ! Aïe ! Aïe ! Ah les salauds ! Ah les vrais fumiers ! Ah les traîtres !
Ces enfoirés de copains
(mais devais-je encore les appeler « copains « ?)
m’avaient entièrement démonté mon pistolet mitrailleur,
dont toutes les pièces étaient admirablement bien rangées sur mes draps blancs !
Déjà, remonter un pistolet mitrailleur ce n’est pas coton, surtout quand on n’en a pas l’habitude, mais se farcir le feu nourri des « joyeusetés », des conseils « amicaux » d’un sergent furibard, je vous jure que c’est un grand moment de solitude !
Une semaine d’arrêt de rigueur !
Et à ramasser les poubelles, tous les matins, avec le camion benne !
C’est pourquoi, même aujourd’hui, quand je suis réveillé sauvagement par le ramassage des ordures, à des heures pas chrétiennes, j’ai quand même une pensée amicale pour les ouvriers qui font ce difficile boulot, et même sans être punis, eux !
Quand je pense que j’avais un full par les as ! Je n’ai jamais eu de pot au jeu !
Mais le plus triste, le plus navrant, c’est de savoir que mes pauvres enfants ne connaîtront Jamais ces moments d’intenses « camaraderies », ces émotions « viriles »,
ces situations « géniales » que des médisants croient « ubuesques » mais qui nous permettent d’avoir de si beaux souvenirs de nos services militaires d’autrefois !

mardi 11 novembre 2008

Une non déclaration d’amour

Oh que non ! Bien sûr que non !
Je ne t’aime pas !
Je ne t’ai jamais aimé ! Je refuse de toutes mes forces cette niaise idiotie !
Quoi ? Cette obscénité qui consiste à être esclave de ces sentiments hideux, gluants de stupidité soumise?
Quelle horreur ! Quelle déchéance ! Quelle veulerie !
J’ai failli me faire avoir par ton charme, ta jolie frimousse, et ta chevelure bouclée.
Heureusement ton corps ne m’attire pas ! Ta poitrine me laisse sage ! Tes longues jambes trop maigres, totalement indifférent !
Tu n’as même pas de fesses ! De ces jolies rotondités qui piègent les hommes trop vulnérables aux charmes des déesses callipyges !
Seuls la grâce de tes mains virevoltantes, comme des oiseaux de paradis, m’a envoûté traîtreusement, et le son de ta voix ensorcelante ont failli m’endormir du sommeil de l’hypnose provoqué habillement par la vraie sorcière que tu es !
Mais j’ai su vaincre ce charme redoutable.
Tel Ulysse attaché au mat de son navire, j’ai su repousser, loin de mon âme troublée, la Sirène perverse qui m’attirait de ses appâts vénéneux!
Tu n’auras jamais mon cœur !
J’ai su fuir à temps, pour me sauver de ton pouvoir maléfique ! Ton pouvoir de diablesse !
Dans cette redoutable épreuve, je fus aidé par un miracle divin !
Tu ne m’aimes pas non plus !
Mieux ! Beaucoup mieux !
Je te suis complètement indifférent ! De cette belle indifférence qui sait tuer dans l’œuf tout sentiment !
Ouf ! Quel soulagement !
Quel épouvantable malheur s’il en avait été autrement !
« L’amour est la seule bataille que l’on gagne par la fuite » a dit Napoléon.
J’ai su fuir à temps !
J’ai gagné ! Je suis heureux ! J’ai vaincu cette gorgone redoutable !
Et j’ai reconquis durablement cette joie immense, ce privilège des dieux, cette liberté sans prix :
Etre seul !


PS. Ce « poulet » noir n’est qu’un exercice de style ! Bien évidement !
« Toute ressemblance avec des personnages ou des faits ayant existé, ne serait que pures coïncidences ! »

samedi 8 novembre 2008

La pie et le matou

Il serait amusant de savoir ce qu’aurait pu nous écrire, comme belle fable, notre cher La Fontaine, au spectacle qui me fut offert, un matin d’été ensoleillé, alors que j’ouvrais les volets de ma cuisine.
Sur le sol de la rue, à une vingtaine de mètres en face de moi, s’étalait la fourrure sombre d’un vieux matou, au regard féroce, mais au caractère fort débonnaire.
Il était là, dans la position du sphinx, dans une immobilité majestueuse.
Ce brave chat avait bien du mérite de rester aussi placide, car en face de lui, que vis-je de mes yeux incrédules, et encore englués de sommeil ?
Ce qui me permit de douter un moment de la réalité de ce que je voyais !:
Une pie !
Mais une pie qui, contrairement ce que dit le dictionnaire ne
« jacassait » pas, mais engueulait proprement notre félin à coup de cris sauvages, à dix centimètres de ses moustaches !
La queue dressée vers le ciel, le bec pointant vers le fauve miniature, les pattes bien plantées sur le sol, cela faisait furieusement penser à une scène de ménage.
Je n’ai pas besoin de vous préciser qui faisait l’épouse acariâtre
et où se trouvait le « mari » résigné !
Pensant que « l’époux » ne prenait pas assez au sérieux ses reproches justifiés, miss « bonbon » se mit à tourner autour de lui, en sautillant hystériquement, tout en continuant, bien sûr, son concert strident et courroucé!
C’est alors que je vis Raminagrobis, se plaquer au sol, les oreilles rabattues, et l’air plus furieux que d’habitude !
Je me suis dit :
« Voilà un petit déjeuner sur canapé et à plumes qui se prépare pour
notre moustachu excédé ! » !
Mais non !
Jugeant la « donzelle » un peu trop maigre à son goût ou un peu trop « casse bonbons »
notre « Pomponnet » se redressa lentement, s’étira langoureusement, puis se mit en marche du pas des honnêtes gens, qui n’ont ni soucis ni problèmes!
La queue en point d’interrogation, il se retourna une dernière fois pour voir sa tortionnaire sonore, en ayant l’air de lui dire en guise d’adieu :
« ça m’en touche une, sans faire bouger l’autre ! »
Selon une pensée immortelle proférée par un de nos grands hommes politiques !
Quant au motif de la colère de notre corvidé, nul n’en saura jamais rien !
Mais avec les femmes, allez savoir !

mercredi 29 octobre 2008

Des paupiettes à ressorts !

Comment ? Ça n’existe pas ?
Pas plus tard qu’hier soir, j’en avais une dans mon assiette !
D’ailleurs, en vérité, ce n’était pas la première fois que je découvrais ce genre de « bestioles monstrueuses » !
Il y a quelques années de cela, au self de mon entreprise, j’eus le malheur d’en être servi.

Je m’installais avec mes potes de boulot à une table et commençais mon repas !
Je m’apprêtais à trancher ce petit bout de ficelle de lin qui, depuis des siècles protégeait
« amoureusement » les chairs de ce chef-d’oeuvre de la gastronomie française, quand soudain, je fus interloqué par un phénomène étrange.
Au lieu de la coupure nette et franche attendue, voilà-t-y pas que le fil récalcitrant s’enfonce dans la viande, pour fuir la lame de mon couteau !
Horreur ! Au lieu du fil de lin, c’était un élastique comme celui que l’on met à la taille des slips et des caleçons de notre intimité masculine !
Et avec une résistance colossale, par-dessus le marché !
C’est marrant, mais les élastiques de bureau, ceux qu’on nous vend, sont d’une fragilité scandaleuse !
Mais avec celui des paupiettes, vous pouvez faire du saut à l’élastique, sous les piles du viaduc du Millau, vous n’avez rien à craindre !
Pour me rassurer sur la réalité de ce que j'observais, j'interrogeais mes collègues:

Eh ! les mecs ! On est quel jour ? Pas le premier avril, j’espère ?
Regardez la blague que l’on vient de me faire !

Mais ce n’était malheureusement pas une blague !
Mes collègues étaient affligés, dans leur assiette, des mêmes paupiettes perverses que moi !
Ah ! Je ne vous raconte pas le combat homérique qui suivit, pour becqueter ces « vacheries » !
On se tirait sur l’élastique avec l’énergie du désespoir !
(Oh ! Ça va ! Pas de blague foireuse ! Je vous vois venir !)
Paf ! L’infecte accessoire repartait frapper les flancs de l’escalope, en auréolant au passage nos cravates et nos chemises de belles tâches bien graisseuses, et bien colorées !
De temps en temps, se produisait « l’incident » malheureux !
Un paquet de viande ficelée s’évadait d’une assiette pour atterrir dans celle du voisin, qui vous répondait d’une manière rogne et peu amène !

_Non-merci ! « J’ai les mêmes à la maison ! »

Ce qui aurait dû être une collation sympa et reposante, dans un self d’entreprise, se transformait en bataille épique avec des morceaux de bidoches partout sur la table !
Ô la rage ! Ô la haine qui me vint contre les sombres crétins qui avaient inventé cette chose infernale !
Mais je me disais que la cantine d’un « pauvre » CE n’étant pas riche, et tirant le diable par la queue (ou l’élastique) s’était rabattu sur des produits de basse qualité, pour tenir son budget !
Alors qu’elle ne fut pas ma colère et mon désespoir de voir réapparaître cet objet du diable, dans mon assiette, hier soir !
Mais une idée cauchemardesque se fit jour dans ma caboche !
Serait-il possible, que désormais, « toutes » nos paupiettes glorieuses, vendues dans le commerce, soient affligées de la même…..tare ?
Mon Dieu ! Est-ce possible ?
Cet attentat criminel contre la gastronomie française a-t-il été perpétré sciemment par quelques fonctionnaires irresponsables du côté de Bruxelles ?
J’écris cela parce que ce ne serait pas la première fois que des niaiseries, des directives ubuesques nous tomberaient sur le paletot, sans crier gare, et sans avoir été prévenu le moins du monde !
Ou par des industriels cupides et viandards à la recherche de rentabilité et de profits toujours plus….juteux !
Qu’en penserait notre pauvre « Paulette » qui, comme personne ne l’ignore, fut la reine des paupiettes !
Olé !

mardi 14 octobre 2008

Une érection de « qualité » !

Ou « Roger » au bagne !

Ce matin, dans ma salle de bain, j’écoutais, à la radio, une voix mélodieuse, et terriblement féminine faire la publicité d’une revue médicale. Pour se faire, elle nous parla d’un article qui devait permettre aux hommes de retrouver
une « érection de qualité » !

«Caramba ! Oune érrresssionne di quoualità » ?
Se serait exclamé le Barbier de Séville !
Surtout dans la « bouche » d’une voix si charmante et si…sensuelle !
Pour le coup, mon « Roger » s’est réveillé d’un seul coup !
A chaque fois qu’on parle de lui, il faut qu’il la ramène !
Il est toujours en bonne santé, lui !
Jamais une seule défaillance !
Il me ferait plutôt des excès de « zèle » que de rester discret dans sa niche !
Dès que des courbes bien dodues se présentent à son périscope, il me fait une sérénade de tous les diables !
Et impossible de le retenir ! Il me fait des caprices, des insolences qui me font honte !
C’est comme à la piscine ! Je n’ai qu’une trouille, qu’une angoisse, c’est que cet espiègle indiscipliné pointe le bout de son museau, à chaque fois que passe une naïade affriolante !
Je vous prie de croire que son « érection » est de qualité à pépère !
Et vaillant, avec ça ! D’une endurance de marathonien !
Alors, je lui pardonne volontiers son immaturité d’adolescent !
Je me marre quand j’imagine un « gonze » au plumard avec une donzelle et que « Roger » renâcle !

_Mais n’aie pas peur, mon petit « Roger » la Madame ne va pas te faire du mal !
Elle va être très gentille avec toi ! Et puis fait un effort quoi ? Ne sois pas mufle !

Là, on peut varier les dialogues !

_Tu ne vas pas me faire ça, à ma future maîtresse, à ma future femme, à ma patronne qui doit me donner une promotion ? Ne m’abandonne pas lâchement au moment où j’ai le plus besoin de toi ? Après tous les soins dont tu bénéficies quotidiennement de ma part ?
Sale petit ingrat, va !

Mais « Roger » reste imperturbable et cabochard !
C’est que « monsieur » à ses « têtes » ! (Si j’ose dire !)
Et il fait la « fête » à qui il veut, quand il veut !
Au grand désespoir de celui qui prétend le « commander » !
Alors, je me demande avec intérêt et curiosité comment de grands médecins peuvent forcer, contraindre cette pauvre bestiole à une tâche qui la rebute de temps en temps !
Madame Bardot est-elle au courant, au moins ?
Et puis, un travail « forcé », un travail « d’esclave » n’est pas un travail de qualité !
N’est-ce pas Mesdames ?

samedi 4 octobre 2008

Trois extraterrestres....bien terrestres!

Si! Si! On peut parfaitement être considéré comme des
« extraterrestres », même si l'on est bien nés sur cette bonne vieille terre!
L'histoire que je vais vous raconter, va vous le prouver sans ambiguïté.
Ils sont trois pauvres prisonniers militaires dans ce camp du Nord de l'Angleterre, à la fin des années quarante.
La guerre est finie depuis de long mois déjà.
Ces prisonniers allemands, car il s'agit des lambeaux de la puissante armée allemande, attendent de rentrer chez eux!
Ils travaillent souvent dans les fermes des environs, bricolent, passent le temps comme ils peuvent!
Mais ces trois là ont une particularité fort étrange pour des « Allemands »!
Ils ont le type mongoloïde, la face plate et les yeux bridés! Le plus déroutant c'est que, non seulement ils ne parlent pas allemand, ce qui est grave pour des prisonniers
« Allemands », mais surtout, ils parlent un dialecte qu'ils sont les seuls à comprendre, et à employer entre eux!
On est très loin de la race des seigneurs, grands blonds aux yeux bleus, comme chacun le sait!
Eux, ce serait plutôt la race des steppes; petits, trapus, bruns, et les yeux en boutonnières de veste!
Personne ne s'occupe d'eux, ni ne cherche à savoir d'où ils viennent!
Les autorités anglaises sont embarrassées car elles ne savent pas à qui refiler ces trois « zozos »! Aucun pays n'en veut! Ni les Allemands, ni les Russes, ni personne!
C'est un autre prisonnier allemand, un authentique compatriote de Goethe, cette fois-ci, spécialiste des langues orientales qui a l'idée, tout à fait personnelle, de s'intéresser de près à ces faux « compatriotes »!
Il s'aperçoit rapidement que ces hommes parlent un langage proche de celui utilisé dans le haut Altaï, en pleine Mongolie centrale! Ce sont des Kalmouks!
Ah! La joie délirante et enfantine de ces trois pauvres « diables », qui ont enfin le bonheur d'être compris par quelqu'un d'autres qu'eux-mêmes, et ceci depuis plus de quatre longues années!
Et comme tous les muets contraints, et les bavards refoulés, ils vont être intarissables pendant des journées entières
Ce que ces trois pauvres épaves humaines vont alors lui raconter, est proprement hallucinant! C'est tellement incroyable que cela ne peut-être que..... vrai!
Heureusement qu'il y a des documents historiques pour l'attester, sinon personne n'y croirait!
Alors? Je vous la raconte ou vous la connaissez déjà?


Ils sont trois marcheurs solitaires, avec leur maigre baluchon, dans la poussière, sous le soleil et la chaleur du chemin rocailleux.
Cela fait des heures et des heures qu'ils ont quitté leur petit village de montage qui vit là-haut, depuis des siècles, de la même manière moyenâgeuse et pauvre. On n’y connait pas l'argent, mais simplement le troc.
C'est pour celui-ci que nos hommes arrivent maintenant devant les remparts, de couleur ocre d'une ville à peine plus moderne que leur village. En pénétrant, ils sont surpris du calme inhabituel et du peu d'activité qui y règne.
Comme leur marché ne se déroule que le lendemain, ils dorment tassés ensembles, dans le recoin d'une porte cochère.
Au petit jour, ils ne trouvent toujours personne. Devant cette situation étrange et inhabituelle, ils décident de repartir rapidement.
Mais au moment où ils veulent franchir l'une des portes de la ville, ils sont arrêtés par un barrage de militaires en arme; des cosaques!
Dialogue de sourd, palabres, vociférations, incompréhension, ils se retrouvent emmenés de force, sous la menace des fusils, dans des camions, vers une destination inconnue.
Dans une ville, toujours inconnue d'eux, on les habille de drôle de vêtements et on leur donne un fusil dont ils comprendront difficilement le fonctionnement qu'à force de cris et de hurlements toujours incompréhensibles proférés par des instructeurs cosaques hargneux et fort peu amènes!.
Puis un jour, on les entasse dans un train, dans des wagons à bestiaux, sans hygiène, sans le moindre confort. Ils vont voyager ainsi pendant des jours et des jours!
Les conditions de vie sont atroces! Il fait un froid épouvantable! Mais ils résistent!
Ils arrivent sur le quai d'une gare dans une ville encore plus grande et toujours plus mystérieuse.
Là, ils assistent médusés à un discours d'un petit homme à l'uniforme kaki et à la moustache drue et fournie. Ils apprendront plus tard qu'il s'appelle Staline!
Ils vont participer à la bataille de Stalingrad pendant des mois et des mois!
Oui! J' écris bien à la bataille de Stalingrad, l'une des plus meurtrières et des plus sanglantes de la guerre 39-45!
Leurs "pseudo" compatriotes meurent par dizaines, tous les jours. Ils se retrouvent de moins en moins nombreux au fil du temps qui passe.
Un des trois est gravement blessé, mais on les laisse ensemble parce qu'ils sont les seuls à se comprendre. Le blessé finit par se rétablir.
Mais un jour qu'ils combattaient dans une rue, leur officier leur crie un ordre qu'ils ne comprennent pas, bien sûr!
Tout un bloc de maison s'écroule devant eux, les séparant brutalement de leurs camarades russes!
Ils se retrouvent face aux allemands qui les font prisonniers.
Les Allemands sont aussi embarrassés par ces étranges prisonniers que le furent les Soviétiques avant eux !
Que faire de ces trois lascars? Le plus simple aurait été de les fusiller?
Mais sont-ils tombés sur un officier touché par leur « étrangeté » et leur détresse?
Toutes les situations, même les plus absurdes, et surtout les plus absurdes, surviennent souvent pendant les conflits armés!
Bref, Ils sont, en définitive, enrôlés de force dans l'armée Vlassov, qui était faite de déserteurs russes luttant contre le régime soviétique.
Et voilà nos trois Mongols repartis à combattre leurs anciens camarades, dans une guerre qui n'est toujours pas la leur, avec des soldats dont ils ne comprennent toujours pas la langue!
La fin de la guerre approchant, les éléments de l'armée Vlassov étant de moins en moins sûrs, les Allemands décident de les faire changer radicalement de front.
Par quels détours et par quels miracles se retrouvent-ils en France? Nul ne le saura jamais!
Ils ne peuvent l'expliquer eux-mêmes!
D'ailleurs, pour eux la France ne représente qu'un changement de paysage supplémentaire, avec quand même, du déjà vu, puisqu'ils se retrouvent dans le massif alpin près du fameux plateau des Glières!
Mais là ils décident qu'ils en ont assez de cette situation imbécile!
Ils font la "grève" de la guerre en s'endormant du sommeil des justes dans un verger!
Comble de malchance ou chance extraordinaire, c'est là qu' ils sont fait prisonniers par des maquisards!
Pendant des mois, ils vont être de corvées diverses et variées sans trop se plaindre de leur sort.
Ce qui se passe ensuite est assez confus et bizarre!
Toujours est-il que c'est de nouveau sous l'uniforme allemand qu'ils sont fait prisonniers par les troupes américaines ayant débarquées en Provence et remontant vers le nord!
Les Américains les remettent enfin aux anglais!
Et c'est ainsi que nos trois pauvres malheureux se retrouvent dans les brumes et les froidures de la belle Écosse!
Pour comprendre un peu l'origine de leur mésaventure, il faut savoir que
Leur petit village se trouvait en Mongolie indépendante, mais en allant à la ville, où ils avaient leurs habitudes commerciales, ils avaient pénétré le territoire soviétique!
Pas besoin de vous préciser que pour eux, les frontières, la géographie, les subtilités géopolitiques, c'était pas leur tasse de thé (Mongol).
Entre temps, leur village est repassé sous l'autorité chinoise pour être enfin récupéré par les Russes à la fin de la guerre!
Plus merdique et plus compliqué que cela, c'est pas possible!
Alors que ces trois braves garçons étaient la simplicité même!
On ne sait pas dans quelle condition, ni comment sont rentrés nos trois égarés, mais une chose est sûre, c'est que les longues nuits d'hiver, dans les chaumières du village, là-haut, dans les montagnes de l'Altaï, ont dû résonner de leurs exploits guerriers pendant de longues années!



mardi 16 septembre 2008

Un siège douloureux !


Non, il ne s’agit pas, ici, de l’histoire d’une chaise bancale, d’un fauteuil troué ayant fait souffrir un dos fragile.
Il s’agit d’un siège militaire en règle !
Mais sans vouloir le comparer à celui d’Alésia infligé par le grand Jules, aux auvergnats ou à celui de la pucelle devant Orléans, afin de chasser des « roast-beefs » envahissants, celui que je subis dans ma prime jeunesse, ne m’en a pas moins laissé, dans ma jeune cervelle, un souvenir aussi précis que ceux, dont j’eus la connaissance, plus tard dans les livres scolaires.
Les deux acceptions du terme sont d’ailleurs bien imbriquées dans cette histoire familiale ! Comme vous pourrez le constater !
Ma pauvre mère ayant sombré dans une affection psychologique assez commune, c'est-à-dire la dépression, la fratrie fut impitoyablement dispersée
au « quatre coins » de l’hexagone, comme l’écrivent certains imprudents !
A cinq ans, l’un de ses membres atterrissait, seul, dans le sombre et inquiétant pays de Rimbaud ; les Ardennes.
Avec le recul, je comprends pourquoi ce jeune homme, plein de vie et d’enthousiasme, l’a quitté si rapidement, pour des contrées lointaines plus accueillantes et plus chaudes de la Somalie et de l’Arabie !
Parce que les Ardennes, dans les années cinquante ! Hou !La ! La !
La brume, le froid, les sombres, profondes et inquiétantes forêts de sapins, les fumées d’usines, le bruit lancinant du marteau-pilon, tout cela n’inclinait pas le cœur à l’optimisme de
« l’Italien qui sait qu’il aura de l’amour et du vin » !
Pour parfaire ce joyeux tableau, la parentèle qui l’accueillit ou plutôt, pour parler plus juste, qui le recueillit, se composait de trois vieillards plus intéressés par la rubrique nécrologique du quartier que par la venue de ce petit oiseau tombé du nid !
Il s’agissait de ses grands-parents paternels, flanqués de l’ancêtre inoxydable ;
son arrière-grand-mère !
Ah la « Mémère Célina » ! Un personnage !
Une tête ronde, plus ridée qu’une pomme blette, toute vêtue de noir, comme il se devait en ce temps là, pour ajouter un peu plus d’optimiste et de « gaîté » à l’ambiance de tombeau qui régnait déjà dans la maison !
Heureusement pour le gamin solitaire, il y avait un beau jardin potager, derrière la maison, prolongé par un petit verger en pente très prononcée, touchant la lisière de la forêt qui nous dominait de sa masse sombre de verdure.
Et, oh miracle !Une balançoire trônait là depuis l’enfance de son père !
C’est vous dire si elle n’était pas récente !
Un beau matin d’été, miraculeux dans ces contrées nordiques, mémère Célina poussait gentiment son arrière-petit-fils sur cet engin oscillant.
Au bout d’un moment, comme tous les affreux galopins de 5 cinq dont la patience est très limitée, il en eut marre d’être poussé ainsi par la veille dame et commis le crime de lèse ancêtre ; il lui flanqua la planche du siège à travers la figure ! Le fit-il volontairement ou accidentellement, peu importe !
Mais Célina poussa un cri de douleur et de rage :

Hou ! Il m’a fait mal, le petit saligaud !

La riposte fut foudroyante, et à la fin d'une poursuite échevelée à travers le jardin et toutes les pièces de la maison, l'agresseur ne dut son salut que par un refuge stratégique sous le lit de la grand-mère!
Mais l'offensée ne s'avoua pas vaincue pour autant!
Elle entama un siège en règle ; et le mot "siège" prend ici toute sa saveur, quand on saura que l'ancêtre s'installa confortablement dans un fauteuil pour tricoter, en face de la cachette provisoire de "l'infâme" agresseur!
L'assiégé aurait indubitablement succombé à une famine redoutable, si la fille, par une inexplicable traîtrise, dont seules sont capables les femmes, n'avait pas ravitaillé en cachette l'infortuné combattant, au nez et à la barbe de sa propre mère!
(ou plutôt, à la "moustache" de celle-ci!).
Je n’ai pas le souvenir précis de savoir comment s’est terminé cette histoire dramatique.
Le drapeau blanc fut-il hissé ? Et la fessée évitée ?
C’est qu’on ne plaisantait pas, à l’époque
avec la dignité des adultes !
Ah! C'est qu'il s'en est passé des choses affreuses dans cette famille des "Atrides"!
Quant au garnement, je ne dévoilerai pas son identité, eu égard à l'honneur de ma famille, que je me dois de protéger!